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lundi 18 novembre 2019

Conclusions du Forum, Les 45 ans de l'étapisme

[m-à-jour le 18-11-2019 - 21h10]

Qu'est-ce que l'étapisme ?

L'étapisme résume la doctrine adoptée par le Parti québécois à partir de 1974. Promue par Claude Morin dès son adhésion au parti en 1972, l'étapisme s'était présenté comme une stratégie améliorée d'accession à la souveraineté, l'étapisme s'est cependant révélé beaucoup plus que ça. Le
référendum qui en est le noyau faisait de celui-ci une condition préalable à toute négociation constitutionnelle. Pourtant, personne n'avait jamais objecté qu'une telle condition devait être remplie pour discuter du contentieux constitutionnel entre un membre de la Confédération et le gouvernement central. D'ailleurs, à moins de croire que nous sommes enfermés dans un régime totalitaire, il apparait justifié que des partenaires entrés librement dans un régime  confédéral puissent en discuter librement les termes par la suite. Le référendum élevait donc une barrière nouvelle à franchir pour arriver à des négociations constitutionnelles sur le statut du Québec au sein du Canada ou, à l'extérieur de celui-ci. Une relecture des questions référendaires de 1980 et de 1995 ne laisse d'ailleurs aucun doute à ce sujet. Une victoire ne pouvait conduire qu'à la table de négociations. Certes, la lutte partisane et la fièvre qui montait dans les deux camps avaient dramatisé grandement les campagnes référendaires, mais le texte des questions ne trompe pas quant à la portée véritable de la démarche. 

Quelles sont le conséquences de l'étapisme ?

L'étapisme a constitué un acte fondateur de la nation civique, un acte de fusion des deux nations, orchestré par la volonté du Parti québécois d'abord, puis par le pouvoir étatique ensuite. De ce qui avait été jusque là une cohabitation de deux nations bien distinctes sur le territoire du Québec, deux nations traversées par un séparatisme sociologique assez réel et bien assumé de part et d'autre, on fera apparaître une nation de synthèse : la nation québécoise. On établira une communauté de destin plus forte, reliant plus étroitement le sort de la nation canadienne-française au sort des Canadiens-anglais en donnant à ces derniers plus de poids. Par le vote référendaire individuel, on leur accordait, sans qu'ils le demandent, un pouvoir décisionnel accru qui leur permettait de bloquer les initiatives légitimes de la majorité. Un pouvoir supérieur à ce que leur garantissait jusque là un processus électoral bien établi. Notre conclusion est que l'approche référendaire a dramatisé et empêché toute négociation constitutionnelle depuis l'élection du Parti québécois en 1976. Corollaire, elle offrait sur un plateau d'argent une belle excuse au fédéral pour refuser toute négociation avant une victoire référendaire. Une faille que P.-É Trudeau s'empressa d'exploiter dès 1975, confortant le gouvernement fédéral dans une intransigeance qui faisait bien son affaire. Le référendisme semble bien avoir exaucé les souhaits les plus fous d'Ottawa, en faisant de lui le maître du jeu. 

L'essor de la « nation québécoise » un produit de l'étapisme

La formation d'une nation québécoise civique et synthétique doit son essor à l'étapisme. Elle a pu s'imposer par un effort persistant de l'État pour minimiser et tenter d'effacer les inégalités nationales dans le débat public, pour reporter à peu près entièrement le contentieux national sur la ligne d'une rivalité entre Québec et Ottawa, une rivalité inter-étatique largement post-nationale. Si bien que la question dite nationale ne semble plus tenir aujourd'hui qu'à des politiques climatiques, environnementales, énergétiques et du même ordre. La nation socio-historique en a été expulsée au profit du multiculturalisme et de la diversité.

L'État du Québec est l'État le plus fédéral du Canada

Il fédère plus que tout autre, car fédérer c'est arbitrer, c'est faire la part entre les parties. C'est gérer les contradictions entre des intérêts nationaux différents.

La nation québécoise est une fiction uni-nationale au sein de laquelle se dissimule le conflit entre deux nations. Ce conflit persiste mais, inavoué, il se cache dans un fédéralisme québécois qui refuse de dire son nom. Il agit néanmoins très efficacement. Le fédéralisme québécois gère le statu quo entre deux nations réelles et inégales, mais sans le dire. Il se camoufle dans les considérants d'une loi organique, votée unanimement par l'assemblée nationale en  2000, la loi 99. Le fédéralisme québécois de Lucien Bouchard et de Jean Charest, agit selon des règles implicites, inégalitaires et non écrites. Il assure le développement continu de la minorité démographique anglophone au Québec, qu'il favorise, grâce aux «droits consacrés» que lui reconnaît l'État, au détriment de la majorité canadienne-française qui a perdu ses défenses, amenée à croire qu'elle faisait partie d'une nation commune qui serait libérée un jour par un référendum gagnant. Elle a en fait été désarmée.

La revendication de reconnaissance et d'égalité nationale 

La première revendication nationale devrait demander que le Québec reconnaissance la nation fondatrice du premier Canada. Une nation dont l'existence ne faisait pas de doute en 1759 et 1760, une nation dont l'existence ne faisait pas de doute dans le rapport Durham, une nation qui ne faisait pas de doute dans les débats constitutionnels de 1865, mais une nation dont l'existence est niée depuis la formation du Parti québécois. Les Canadiens-français devraient exiger de l'État du Québec une pleine reconnaissance nationale. Jusqu'à présent, par son fédéralisme camouflé, le Québec ne reconnaît que des communautés linguistiques, ce qui est insuffisant. Un positionnement étatique à Québec qui nous oblige à faire un parallèle avec Ottawa, où l'on ne reconnaît pas les nations, mais uniquement deux langues officielles dans un pays multiculturel et post-national. Ceci permet de souligner l'étroite parenté doctrinaire entre Québec et Ottawa. Si bien que l'indépendance du Québec, sans reconnaissance des nations socio-historiques et l'établissement de leur égalité, ne mettrait pas forcément fin au fédéralisme inégalitaire du Québec. En tout cas, les doctrines de deux États libéraux comparables (Québec et Ottawa), de même que les positions publiques exprimées par Québec solidaire et le Parti québécois le font craindre.

Les objectifs des forces patriotiques 

L'objectif des forces patriotiques pour l'égalité passe par la reconnaissance de la nation canadienne-française par l'État du Québec. Un autre objectif vise la récupération ou la reconstruction de nos institutions nationales, détournées de leur mission d'origine, ou détruites par la québécitude. Un chantier d'autant plus important que le fédéralisme inégalitaire québécois, calqué d'Ottawa dans le contexte provincial, conduit à la minorisation démographique de la nation fondatrice d'ici 20 à 30 ans. 


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