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mercredi 6 janvier 2021

Le référendum de 1995, une analyse canadienne-française

[mis-à-jour le 8/01/21]
Il y a un peu plus de 25 ans, le 26 septembre 1994, Jacques Parizeau devient premier ministre du Québec. Il annonça son intention de

démissionner comme député et premier ministre le 31 octobre 1995. Sa démission deviendra effective le 29 janvier 1996, au moment où Lucien Bouchard prendra la place.


Élections
Parizeau l'avait emporté aux élections du 12 septembre précédent : 
«Le Parti québécois de Parizeau et le Parti libéral de Johnson sont presque à égalité quant au pourcentage du vote populaire. Le Parti québécois, avec 44,75 %, devance le Parti libéral (44,40 %) par moins d'un demi-point de pourcentage. Par contre, le nombre de sièges est décisif : les péquistes remportent 77 sièges contre 47 pour les libéraux, formant un gouvernement majoritaire et disposant de toute la latitude nécessaire pour déclencher un référendum sur la souveraineté du Québec. » 
(Wikipédia)

Référendum
Parizeau enclenche rapidement des préparatifs en vue d'un référendum. 

La question référendaire se lira comme suit : 

« Acceptez-vous que le Québec devienne souverain, après avoir offert formellement au Canada un nouveau partenariat économique et politique, dans le cadre du projet de loi sur l'avenir du Québec et de l'entente signée le 12 juin 1995 ? »

Claude Morin, père du référendisme et 
péquiste déloyal, recevait de l'argent des
services canadiens à l'insu de son chef.

Après René Lévesque, qui avait vécu des tricheries
référendaires en 1980, Parizeau s'engagera dans la même
voie,  avec les mêmes tricheries à la clé. Le référendum est
la méthode propre à la nouvelle identité québécoise 
pluri-nationale pour barrer la route de l'émancipation
au peuple canadien-français en donnant aux anglophones
le dernier mot sur son destin. À titre de peuple conquis,
et autochtone depuis la Conquête, n'aurait-il
pas mieux valu de s'en remettreau droit
international plutôt que de s'en remettre aux Anglais du
Québec ? Comment a-t-on pu penser que les Anglais
du Québec étaient différents de ceux du Canada ? 


Si on lit bien la question référendaire elle compte deux volets, soit l'ouverture de négociations constitutionnelles portant sur, « un nouveau partenariat économique et politique ». Cependant, du moins dans le camp Parizeau, la présomption que les négociations étaient vouées à l'échec a eu pour résultat que le débat public s'est rapidement polarisé sur la première partie de la question : 
« Acceptez-vous, oui ou non,  que le Québec devienne souverain ? »

Rappelons qu'en vertu de la loi et de la constitution, un référendum n'a qu'une valeur consultative. Parizeau avait cependant prévenu qu'il démissionnerait en cas de rejet du référendum.  En outre, laissant courir le bruit que le référendum serait quasi-décisif, Parizeau se campait dans une position de force qui dramatisait plus que nécessaire la portée de la consultation, et, du coup, il se privait du loisir éventuel de répliquer avec une deuxième manche. Avec cette tournure des choses, le camp souverainiste jouait son va-tout dans un événement unique, ce qui ne pouvait déplaire aux fédéralistes. Un peu comme dans le cas de René Lévesque, 15 ans plus tôt, Parizeau brûlait ses vaisseaux pour un pari dont il ne maîtrisait pas toutes les règles d'exécution. Comme on était toujours dans le sillage d'une élection qui n'avait pas donnée la majorité des voix au Parti québécois, le référendum pouvait être pronostiqué dès le départ comme un exercice qui ne permettrait pas de trancher. Téméraire, Parizeau prétendait pouvoir le faire. 

Résultats
Les électeurs iront aux urnes le 30 octobre 1995. Avec 50,58 % des 4,7 millions de votes exprimés, le non l'emportera. Sur un peu plus de 5 millions d'électeurs enregistrés, 93,52 % voteront, un taux de participation record au Québec. Le minuscule écart entre le « oui » et le « non » sera de 54 288 voix.

Acceptation
Parizeau acceptera sur le champ des résultats aussi serrés. Ce qui était une nouvelle imprudence. Il maintiendra par la suite sa concession hâtive de la défaite, même si de nombreux signes de tricherie avaient commencé d'émerger bien avant la date du vote. Comme en 1980 d'ailleurs ! 


Il surprendra plusieurs de ses partisans en n'encourageant aucune contestation, comme la qualité d'électeurs de certains immigrants, l'intervention massive du fédéral, le dépassement des dépenses autorisées par le camp du non et un décompte des votes entaché d'irrégularités. Même après la parution d'un dossier étoffé, le livre de Robin Philpot sur le vol référendaire, en 2005, il ne bronchera pas. 

Dans l'avant-propos d'un livre collectif réunissant plusieurs jeunes souverainistes (livre dont j'oublie le nom, mais pas la citation) il maintiendra : «...on a eu beau chipoter,  les résultats étaient là ». Abandonné en cours de route par sa garde rapprochée et la plupart des députés du PQ, donnant l'impression d'un général qui n'avait pas préparé la guerre, Parizeau ne révisera pas sa décision de démissionner. Jusqu'à sa mort il refusera de revenir sur les conclusions décevantes qu'il tira du référendum. 

L'argent et des votes ethniques
Parizeau attribuera sa défaite « à l'argent et à des votes ethniques ». Il oubliera de mentionner les votes des English canadians qui occupent largement le Québec. Ces derniers profiteront du référendum bi-national pour réitérer massivement leur fidélité au Canada, sans changement par rapport à l'expérience référendaire de 1980.  Cet "oubli" des CanadiAns par Parizeau pour, en revanche, blâmer la couenne molle, l'avatar des «votes ethniques et de l'argent» permettait de prolonger le mythe d'une identité québécoise composée des anglophones et des francophones, que Parizeau ne voulait surtout pas faire éclater. Le projet souverainiste aura fait beaucoup de sur place entre 1980 et 1995, en fait, que du sur-place, sur fond d'improvisations génératrices d'une excitation sans lendemain. 

Négociations 
Cinq ans plus tard, dans son témoignage en commission parlementaire sur la loi 99, en 2000, Jacques Parizeau réitérera pourtant l'idée que le référendum portait d'abord sur la négociation. Il dira :

« Au Québec, depuis 30 ans, il n’a jamais été proposé de faire sécession sans négociation préalable. Jamais. Par qui que ce soit. En tout cas, à ma connaissance, jamais par un élu. Toujours l’idée a été que la souveraineté du Québec aboutirait, d’une façon ou de l’autre, par une entente ou une déclaration unilatérale, mais après des négociations. »


La question qui reste en suspens : le Québec qui était à l'origine de l'initiative référendaire, était-il préparé à des négociations sérieuses et à s'y engager de bonne foi ? Probablement pas. Car si une préparation adéquate avait été faite à cet égard, Parizeau aurait tout fait pour utiliser le vote favorable des Canadiens-Français à hauteur de 61 % pour déclarer sur le champ une victoire historique de ces derniers et réclamer sans délai des négociations constitutionnelles sur cette base. La rectitude politique de la québécitude oblige à traîner les Anglais avec soi comme un boulet aux pieds. 

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En complément et à titre documentaire : 
https://vigile.quebec/articles/comment-jacques-parizeau-aurait-pu-changer-l-histoire-le-soir-du-referendum-

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