Il est impératif de faire la distinction entre le «droit de sécession d’une province» et le droit d’un «peuple sans pays» à l’autodétermination. Les souverainistes sont-ils devenus doctrinaires au point de ne pas vouloir clarifier cette question ?
29 octobre 2025
M. Lisée,
En lisant votre article, je réalise que je suis d’accord sur la plupart de vos constats. Comme vous, je pense que le « mouvement indépendantiste » existe essentiellement pour les électeurs francophones. Comme vous dites « il s’agit de donner aux francophones un pays où ils sont majoritaires ». En 1995, 60% de ces francophones ont soutenu le oui, et les autres 40%, dont une forte proportion de beaucerons, sont principalement les responsables de notre échec à atteindre une majorité de la population Québécoise. Une des causes aussi vraisemblable serait l’argent dépensé sans compter par le fédéral au profit du clan du non en violation des règles de financement applicable.
Sur ce point il est aussi vrai que les juges de la cour suprême du Canada ont eu raison de valider la position du Québec concernant les dépenses admissibles lors d’un référendum et donc que le clan du non avait abusé de son pouvoir de dépenser en 1995. Ainsi, il faudra s’assurer comme le prévoit la loi que « les groupes qui souhaitent participer à une campagne référendaire pour une option donnée ont la possibilité soit de s’inscrire directement au comité national soutenant la même option, soit de s’y affilier. Elle prévoit également le financement des comités nationaux et limite leurs dépenses et celles des groupes affiliés. » On peut par contre s’interroger en voyant le nombre de groupes qui se multiplient maintenant dans les médias sociaux, sur la possibilité réel d’encadrer correctement les influenceurs lors d’un prochain référendum. https://decisions.scc-csc.ca/
Je reconnais que vous faites preuve de lucidité et je loue votre franchise lorsque vous admettez qu’en 1995, le camp du oui ne comptait pas vraiment sur le vote des non-francophones, tout en louant la solidarité de ceux d’entre eux qui soutenaient le oui. Comment nier que, pour la plupart, les anglais, les diasporas et les autochtones aient des intérêts ou des points de vue distincts de ceux des natifs francophones concernant le projet de se séparer du Canada? Je m’interroge encore toutefois à savoir pourquoi nous avons décidé de les contraindre à s’identifier à un « peuple Québécois » alors qu’ils se sentent plus de nationalité canadienne que de celle québécoise ?
Que dire de la stratégie de J. Chrétien; son mur du silence. Il avoue lui-même qu’il projetait nier après coup le droit du Québec, en tant que province, de faire sécession du Canada, et donc l’effet d’un référendum gagnant. Il semble évident qu’il ait cru stratégiquement plus sage de ne pas le dire clairement avant le référendum parce qu’il craignait un effet contraire à celui recherché par le clan du non chez les francophones encore tièdes.
Tout en étant d’accord avec vous sur les faits, je nuancerais un peu votre analyse sur la nature de la fourberie représentée par ce procédé. Il y a bien une fourberie mais est-elle vraiment liée au caractère mensonger de cette approche stratégique?
D’abord, il faut se souvenir que Jean Chrétien était non seulement premier ministre du Canada mais aussi avocat. Il complétera sa carrière dans un des bureaux les plus fédéralistes et nationalistes canadiens du pays (Heenan Blaikie). Aussi, vous avez raison lorsque vous dites que Jean Chrétien était « convaincu » du bien fondé de sa position. De fait, pour lui, le droit de sécession d’une province n’était pas aussi simple que ce que pouvait le laisser croire le clan du « oui » qui alléguait que la séparation serait incontestablement le résultat d’un référendum gagnant. C’est encore aujourd’hui la prétention du PQ à la fois pour celui de 1995, qu’on se serait fait voler, que pour un futur référendum; le plan est simple, on vote, on gagne et le Québec devient un pays.
Fort de sa conviction juridique, Chrétien redoutait-il qu’il soit difficile d’exposer clairement sa lecture de cette réalité légale dans un débat référendaire au cours duquel les esprits d’une majorité de francophones carburaient plutôt au droit de leur peuple de se libérer de l’emprise de celui du conquérant? Si oui, il aurait eu certainement raison de percevoir ce niveau de difficulté. Chose certaine, il n’a pas choisi cette voie. S’il avait opté pour une [telle] approche il aurait été amené à clarifier les fondements de sa conviction. Avec un large auditoire très attentif, ses explications n’auraient-elles pas eu l’inconvénient de mettre en évidence une importante distinction à faire entre le «droit de sécession d’une province » et celui du « droit à l’autodétermination d’un peuple » sans pays?
Je m’interroge maintenant à savoir si, depuis la fin des années 60 et la montée du mouvement souverainiste, la relative stabilité du fédéralisme canadien n’aurait pas reposée en partie sur l’ignorance de cette distinction? Chose certaine des slogans comme « le Québec aux Québécois », « le Québec mon seul pays » ne donnaient aucune place à la nuance. Il semble que le cadre du duel Québec/Canada repose toujours sur la relation (constitutionnelle) d‘une province avec son gouvernement central. C’est le Québec qu’on veut libérer. Comme disent les analystes, en politique il y a souvent des raccourcis.
Mais est-ce que ça nous fera arriver plus vite au but.
Le plus grand nombre de Québécois et, il me semble, même les promoteurs actuels du mouvement indépendantiste, préfèrent ne pas s’embêter avec une nuance juridique qui existe assurément entre le droit d’une province et celui d’un peuple. Pour faire simple, le discours vise à convaincre tous les Québécois que le Québec est une nation distincte avec un peuple y étant associé. Ce peuple jouit donc du droit de s’autodéterminer. Dans le paradigme de l’indépendance, la seule question qui subsiste est donc, ce peuple veut-il se donner un pays? La réponse de nos anglophones qui nous rappellent qu’ils sont aussi des Québécois est facile à deviner.
Pour y répondre le plan des indépendantiste est simple. Il suffit de faire un référendum sur le « pays Québec ». Depuis 1974, ce plan est au cœur de la stratégie Indépendantiste qui enrobe le processus avec une lecture juridique établissant catégoriquement un droit de sécession du Québec plutôt que de faire reposer le projet souverainiste directement sur le droit du peuple des francophones de jouir pleinement de son droit à l’autodétermination. On compte cependant sur un appui nettement majoritaire des francophones pour faire pencher le balancier du bon côté, sans reconnaître clairement qu’il est le peuple pour lequel on veut un pays.
Pire, on nie même la pertinence d’en reconnaître l’existence. On a peur d’être accusé de faire la promotion d’un nationalisme ethnique. On soutient clairement le concept plus inclusif de « peuple Québécois » qui de ce seul fait nous mettrait dans sa forme multi-ethnique à l’abri de telle accusation. On est pas raciste me disent certains, on milite pour le vivre ensemble. Le projet d’indépendance du Québec serait démocratique et inclusif. Tout le monde est du peuple Québécois. Il faut sortir du ghetto Canadien Français disait René. Il n’est jamais discuté, et encore moins admis, que ce concept civique de peuple québécois pourrait occulter juridiquement la possibilité d’une reconnaissance légale de la présence d’un groupe de francophones issus d‘un peuple distinct dans la population du Québec. Trop compliqué pour le petit peuple peut-être?
Le projet « pays Québec » est avancé comme le point de départ du droit à l’autodétermination du «peuple québécois » qui inclus toute la population du Québec. Cette même logique n’est pratiquement plus contestée par les partisans du «non» et est largement reprise par les média de toute tendance. Les tenants d’un statu quo fédéral y perçoivent de plus en plus un avantage certain pour l’option Canada qui peut s’appuyer sur la diversité des groupes formant la population du Québec ce qui contribue clairement à freiner la possibilité de réunir les conditions gagnantes pour un référendum sur la sécession. Certains militants fédéralistes rêvent d’une autre cuisante défaite des indépendantistes. Contrairement à nous, le clan du « non » peut certainement prendre en compte le fait que le vote des non-francophones lui est plus que largement favorable.
Doit on oublier que la stratégie référendaire adoptée en 1974 l’avait été à la suggestion de Claude Morin et que selon son propre aveu, cette suggestion lui venait de certaines fréquentations fédéralistes alors inavouables? Le format du débat est donc un duel Québec/Canada qui doit se faire avec le choix des armes du camp fédéraliste qui sera donc celles d’une province contre le pays!
Jean Chrétien avait certainement de bonnes raisons de croire en 1995 que s’il annonçait sa position à saveur juridique, les gros titres des médias, auraient surtout consisté à faire la publicité de sa position de « ne pas reconnaître automatiquement le résultat d’un référendum gagnant ». Est-ce que ça aurait pu avoir pour effet de sécuriser le « oui » des francophones qui craignaient encore, comme les Beaucerons, que l’indépendance, étant certaine après une victoire référendaire, ça créerait un vide trop important sur nombre de sujets importants? Est-ce que ça aurait pu conforter les tenants durs de l’indépendance quant à la nécessité de faire un barrage contre la nature emprisonnante de la constitution canadienne ? Peut-être que oui, mais peut-être que non. On ne le saura jamais puisque tel ne fut pas son choix. À la veille du scrutin, il dira que le vote pour le oui brisera à jamais le lien économique avec le Canada, contrant ainsi l’argument du clan du oui visant la recherche d’un partenariat sur ce sujet avec le négociateur en chef d’un Québec souverain Lucien Bouchard. La stratégie du clan du oui voulait aussi rassurer sans vraiment pouvoir garantir un résultat: une fourberie? Mais, n’est-ce pas en relation avec ce type d’inquiétude sur la définition de l’avenir que l’idée toujours vivante d’une constitution québécoise soit encore sujette à une discussion sur la nécessité qu’elle soit préalable ou postérieure à un référendum sur l'indépendance?
En optant pour laisser courir la vraisemblance de la position du clan du oui, surtout celle des militants séparatistes, et de plutôt mettre les électeurs en face de ce scénario indépendantiste aux effets encore imprécis, J. Chrétien pouvait stratégiquement compter sur la peur des tièdes, sans pour autant avoir à renoncer à sa conviction que le droit constitutionnel, qui est autre chose qu’une croyance populaire, lui donnerait encore l’option de contester sa portée si le oui l’emportait. Doutez-vous que ça aurait été la cas ? Qualifier le stratagème de fourberie ne reposerait-il pas davantage sur une émotion de vaincu que sur la réalité des faits et des circonstances propres à la campagne référendaire de 1995 ?
En fait, la lecture que faisait Jean Chrétien du droit constitutionnel a plus tard été pratiquement endossée entièrement par la CSC dans son renvoi de 1998. À l’époque de cette décision, l’auditoire était non seulement beaucoup plus réduit, mais la réaction de Québec a consisté à tenir sous silence et complètement refuser de situer le débat sur cette décision en s’en prenant à la distinction qui y est faite entre le «droit de sécession d’une province » et le droit d’un « peuple sans pays » à l’autodétermination. Sans avoir lu ce renvoi à l’époque, pour les militants indépendantistes dont je faisais parti il fallait plutôt retenir que la lecture du droit applicable par la Cour suprême était vraisemblablement biaisée en faveur de la position Canadienne et qu’il suffisait de légiférer au Québec pour clarifier notre propre lecture du droit applicable et réaffirmer sans broncher le droit du « peuple Québécois » de s’autodéterminer en se donnant un pays. La grenouille peut bien se croire aussi grosse que le castor Canadien.
Plus récemment, en lisant moi-même cette décision, j’ai réalisé que la cour reconnaissait plutôt que la nuance distinctive entre le droit à la sécession d’une province et celui d’un peuple tenait principalement sur le constat fait par la Cour que le groupe des francophones, qui présentaient bien les caractéristiques d’un tel peuple, ne formait qu’une majorité de la population du Québec et que d’autres groupes de la province présentaient aussi de telles caractéristiques. (voir au paragraphe 125).
Selon la logique de la Cour, la population entière du Québec ne pouvait pas prétendre que son droit de sécession découlait de son statut de peuple et que même si elle avait détenu ce statut, ce qu’elle refusa de déterminer, rien ne pouvait garantir que le droit à l’indépendance en découlerait. La Cour explora rapidement ce que serait la situation d’un « peuple québécois » qui rencontrerait par lui-même les caractéristiques d’un (1) « peuple sans pays propre » et auquel on devrait alors reconnaître théoriquement un droit à l’autodétermination. En bref, la Cour indique que le fédéralisme canadien, avec ses juridictions provinciales et fédérales et la participation des Québécois dans chacune de ces structures, ne pourrait pas permettre de conclure qu’il est en soi un obstacle à l’exercice de son droit à l’autodétermination. Même si c’était le cas, elle ajoute que ça ne légitimerait pas nécessairement celui de faire sécession, en application de ce droit, sinon dans le cas où le Canada refuserait arbitrairement les accommodements raisonnables nécessaires à son exercice.
Ce qui est intéressant dans ce raisonnement est qu’il s’appuie sur le cas où le concept de « peuple québécois » serait reconnu comme étant celui visé par le droit international. Mais la Cour venait tout juste de refuser de confirmer que la population entière du Québec rencontrait les caractéristiques nécessaires pour lui reconnaître ce statut. Elle indique qu’elle l’accolerait plutôt au groupe des francophones selon les caractéristiques courantes (paragraphe 125: langue et culture).
Si, comme vous le dites aussi, le « mouvement indépendantiste » existe essentiellement pour les électeurs francophones, pourquoi ne pas acquiescer à la lecture de la Cour plutôt que de situer le débat par la contestation de sa prémisse à l’effet qu’il n’est pas établit que la « population du Québec » rencontre comme telle les caractéristiques applicables à un peuple même si une majorité en présente les traits?
Une réflexion m’est immédiatement venue à l’esprit en prenant connaissance de cette lecture du droit applicable au « peuple sans pays propre » que la Cour suprême situait aussi en relation avec le droit international. Je me suis demandé, pourquoi alors ne pas revendiquer une réforme du fédéralisme canadien actuel pour faire coïncider les écoumènes de ses peuples fondateurs avec une répartition des pouvoirs provinciaux et fédéraux propres à assurer le plein exercice de leur droit à l’autodétermination en tant que peuple? Après tout, la Cour suprême ne nie pas ce droit aux divers peuples sans pays propre du Canada. Elle dit simplement qu’il n’est pas établi que la population du Québec détient comme telle le statut d’un (1) peuple sans pays propre. Elle affirme par contre qu’un groupe approprié pourrait invoquer ce droit.( paragraphe 123) elle écrit « pour disposer de ce droit, le groupe qui l'invoque doit remplir la condition préliminaire, c'est‑à‑dire être qualifié de peuple. »
Lorsqu’elle pousse la réflexion en disant que, si la population du Québec était un peuple, le modèle de répartition des pouvoirs entre les provinces et un gouvernement central serait de nature à perpétuer la souveraineté du Canada sur son territoire entier, ça me semble plutôt concordant avec le concept de souveraineté association de René Lévesque. Ça rejoint aussi le concept de «nation des Canadiens français » avancé par Daniel Johnson si on considère que l’écoumène du peuple des francophones au Canada peut être distingué du celui du territoire de la province de Québec. N’est-ce pas cette distinction territoriale qu’implique le raisonnement juridique de la Cour suprême? Les Acadiens et autres francophones du Canada seraient-ils du même peuple que le mien plutôt qu’associer chacun à un peuple civique provincial ?
Si la Cour suprême a raison, le projet du « pays Québec » avec et pour une majorité de francophones ne reproduit-il pas le modèle du « pays Canada » avec la différence que ce dernier s’appuie pour sa part sur une majorité d’anglophones ? Comment distinguer la nature des relations de l’un ou l’autre des territoires d’application du modèle avec leurs minorités distincte? N’est-ce pas ce type de relation qui crée un inconfort politique tel qu’il nourrit sans cesse le projet d’en sortir partagé par un groupe important de francophones ? Comment avec un projet de nouveau « pays Québec » tel que celui du Parti Québécois, pourrions-nous correctement convaincre nos anglophones de le soutenir et surtout réussir à ne pas créer un climat de panique chez-eux et chez les diasporas, alors que le discours indépendantiste fait reproche aux premiers d’être une menace assimilatrice et aux seconds de nous envahir s’ils ne s’assimilent pas volontairement à notre peuple ? Si ces autres existent vraiment à coté de notre « nous », sur quel écoumène se dessine les pourtours de mon peuple? La Cour suprême énumère la langue et la culture commune, pourquoi serions-nous contre cette lecture?
Et pourtant …
L. Bouchard et J. Facal ont plutôt fait une lecture totalement partisane de ce renvoi. Ils ont réagi en réaffirmant, par la loi 99, que la population entière du Québec formant un peuple, le Québec peut devenir un pays en conséquence du droit de tous les peuples de s’autodéterminer. https://www.
Je dis qu’il s’agit d’un lecture partisane parce que: n’est-ce pas en substance le fondement existentielle du PQ ? Si le peuple québécois, formé de sa population, n’est pas un peuple auquel on reconnaît le droit à l’autodétermination, sur quel droit pourrait bien reposer le projet d’indépendance de cette province? Sur la démocratie applicable à une province plutôt qu’à celle applicable à son pays?
Vingt-cinq ans plus tard, on néglige encore totalement de tenir compte de la position hiérarchique des divers tribunaux en alléguant que la cour d’appel du Québec a confirmé la validité constitutionnelle de cette loi 99. On oublie de rappeler que la décision de la cour d’appel portait essentiellement sur le pourcentage du vote nécessaire pour confirmer qu’un référendum auprès de la population du Québec soit gagnant. La question du droit à l’autodétermination d’un peuple québécois est-elle tranchée ? Si oui pourquoi l’IRAI veut-elle en débattre devant les instances de l’ONU ? Elle allègue qu’aucun tribunal du pays n’a voulu confirmer le lien entre le « droit à l’autodétermination » et un peuple Québécois, ni même l’existence d’un tel « peuple Québécois » pouvant détenir ce droit. Comment expliquer que dans le discours des indépendantistes, ils tiennent aussi catégoriquement ce lien pour acquis ? Et s’ils avaient tort et si le type de peuple visé par le droit international était bien celui des francophones plutôt que celui de la population entière du Québec?
On doit bien pouvoir de poser la question. Si un gouvernement provincial peut vraiment décréter l’existence d’un peuple au sens du droit international par une loi comme la loi 99, pourquoi le Canada ne pourrait-il pas affirmer aussi que c’est au niveau du peuple Canadien qu’on doit évaluer l’exercice de ce droit ?
Comment expliquer que tant les Nations Unies que le Canada aient reconnu les peuples autochtones du Canada, donc aussi ceux du Québec, comme détenant un droit distinct de s’autodéterminer, alors que le Québec les inclus dans un « peuple québécois » qui détiendrait aussi ce droit ? Cette reconnaissance internationale n’est-elle pas nettement plus concordante avec le constat de la Cour suprême dans son renvoi de 1998 lors qu’elle dit: « …. la majeure partie de la population du Québec partage bon nombre des traits (par exemple une langue et une culture communes) pris en considération pour déterminer si un groupe donné est un «peuple», à l'instar d'autres groupes à l'intérieur du Québec et du Canada, … »?
Il est vrai que la Cour n’a pas alors jugé nécessaire de « …. déterminer si, à supposer qu'il existe un peuple québécois au sens du droit international, ce peuple englobe la population entière de la province ou seulement une partie de celle‑ci … ».
Les groupes autochtones étant maintenant reconnus comme des peuples distincts de la population entière du Canada et du Québec au sens du droit international, ça vient déterminer laquelle des options soumises par-là Cour suprême, qui n’a pas alors juger utile d’identifier la bonne, s’appliquait à la population entière du Québec. À supposer qu’il existe un peuple québécois au sens du droit international il n’englobe clairement pas « la population entière » de la province.
La population entière du Québec ne peut constituer un (1) peuple au sens du droit international puisque d’autres groupes d’autochtones qui y vivent détiennent ce statut pour eux-mêmes. Si sa population entière ne forme pas un groupe qualifiable comme tel de peuple au sens du droit international, quel qualificatif peut-on accoler au groupe formant la majeure partie de la population du Québec et qui partage bon nombre des traits (par exemple une langue et une culture communes) pris en considération pour déterminer si un groupe donné est un «peuple»?
On peut sauter directement à la conclusion que ce groupe forme aussi un peuple distinct de la population du Québec et qu’il détiendrait aussi pour lui-même le droit à l’autodétermination au sens du droit international ?
Compte tenu du fait que le concept de « peuple Québécois » est légalement celui de la loi 99, doit-on déterminer laquelle des parties de cette loi devient incompatible avec le concept de peuple au sens du droit international ? Celle où on dit que la population entière du Québec forme un « peuple Québécois » ou celle qui dit que ce peuple détient pour lui-même le droit de s’autodéterminer ?
Pour répondre correctement à cette question, un impératif serait vraisemblablement de bien identifier l’écoumène du groupe détenant les traits permettant de déterminer s’il est un peuple. Or, il découle du fait de la reconnaissance des peuples autochtones que cet écoumène ne correspond pas parfaitement avec le lien administratif des citoyens avec l’État du Québec pour la population qui vit sur son territoire provincial. Si les autochtones regroupés dans leur divers peuples sont néanmoins des Québécois, quel nom ou identifiant de peuple devrait-on accoler au groupe de francophones formant la majeure partie de la population du Québec? Ils sont certainement aussi des Québécois, mais si les Québécois ne forment pas un peuple au sens du droit international, seraient-ils des Kebs, des Canadiens-français ou simplement des natifs francophones ? L’histoire de leur groupe qui est une épopée se limite-t-elle aux natifs francophones de la province de Québec? René Lévesque n’était-il pas natif du Nouveau Brunswick ?
Je me répète: au sens du droit international, les Acadiens et autres natifs francophones du Canada seraient-ils du même peuple que le mien plutôt qu’associer chacun à un peuple civique provincial?
1 commentaire:
Dans le titre «Lettre à Jean-François Lisée : distinguer les droits d'une province de ceux d'un peuple», les droits d'une province se comprend ici comme «les droits d'un État fédéré» dénommé province.
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