Chers
amis,
Depuis le 27 août 2017, j'ai publié une série de chroniques qui frappent sur le même clou. Le paradigme péquiste ( y compris dans ses formes dérivées qu'était Option nationale, mais aussi le Bloc québécois et Québec solidaire) ne peut résoudre la question nationale et ne mérite pas notre appui. Le jugement peut paraître sévère mais il est justifié. Voici pourquoi.
[ Dernière m-à-j le 1er mai 2018]
Mettre à l'écart le néo-nationalisme
Mettre à l'écart le néo-nationalisme
Au cours de la
rédaction de cette dizaine de chroniques j'ai pu approfondir ma
réflexion et procéder à des recherches qui confirment mon idée de
la nécessité de mettre à l'écart le néo-nationalisme qui nous
endort depuis cinquante ans. La démonstration à laquelle je
m'applique à partir de mes analyses est sans appel.
Premier constat, le Québec est une province bi-nationale du Canada, une réalité déniée par le péquisme qui la représente comme un État uni-national.
Deuxième
constat, cette province est entièrement dominée par Ottawa et
sa minorité démographique anglo-saxonne au Québec. La minorité
anglo-saxonne n'est pas une minorité. Elle constitue en fait
une majorité sociologique, une partie de la nation canadian au
Québec, ce qui lui garantit le pouvoir d'imposer son veto sur
l'avenir politique des Québécois canadiens-français. On pourra
qualifier ce rapport de domination comme on voudra, mais il s'agit en
fait de colonialisme institutionnel.
Troisièmement,
le paradigme péquiste, repris par QS et le BQ avec des modalités
qu'essaie d'aplanir le OUI Québec, a passé le rouleau compresseur
sur la nation canadienne-française socio-historique; la seule qui a
intérêt à mettre fin à l'inégalité constitutionnelle et qui
détient toute la légitimité pour le faire. La disparition du
Canadien-français a servi à nier la bi-nationalité et le rapport
colonial évoqués dans les deux premiers constats.
Cette nation ethnique, sociologique, historique, culturelle - des expressions à peu près équivalentes - a été reconnue comme telle par les Pères de la Confédération quand ils interpelaient les « descendants des vaincus » pour qu'ils soutiennent le projet de confédération débattu en assemblée constituante en 1865. La mise en perspective du rapport colonial apparaît limpide et complète avec la désignation des conquérants comme « les descendants des vainqueurs ». Si la Confédération promettait alors d'être un pacte qui donnait l'espoir de réparer les effets de la Conquête par l'octroi de vastes pouvoirs aux descendants des vaincus, il n'en fut rien. Les promesses solennelles faites aux Canadiens-français pour obtenir leur appui - en somme de perfides mensonges - constituent toujours un motif légitime pour mettre en cause l'ordre constitutionnel canadien. Traités en égaux lors de ces débats, les Canadiens-français ne le furent jamais plus. Peu après, on commencera à les plumer comme des alouettes. C'est une première injustice qui a été laissée sans contestation par le péquisme et ses dérivés, qui refusent de monter au créneau pour combattre le péché mortel qui entache le fédéralisme au Canada.
Mais
ce n'est pas tout. En
plus d'avoir été reconnus, parce qu'on avait pris la peine de leur
adresser nommément des promesses, les Canadiens français
jouissent d'une autre légitimité : celle d'avoir été les
fondateurs du Canada. Il vaut la peine de s'y arrêter un moment
car nous parlons d'une entreprise humaine réalisée par voie
d'alliances avec les peuples indigènes, qui ouvrirent ensuite les
portes du continent aux Français et Canadiens. Un modèle positif,
un cas unique dans l'inévitable rencontre entre l'Europe et
l'Amérique, une véritable épopée. Du coté des anglo-saxons,
c'est 150 ans plus tard qu'ils s'imposèrent sur les premiers
Canadiens et leurs alliés par la voie d'une conquête militaire.
Voués à la solution finale par l'assimilation, les conquérants
refusaient toujours, près de 250 ans plus tard, de renoncer à leurs
privilèges sur les fondateurs, réitérant en 1981 leur refus de
reconnaître l'égalité constitutionnelle entre les nations au
Canada. Face à ces injustices, le péquisme avait la possibilité
d'en référer au droit international
coutumier, plaider pour mettre en cause la légalité d'un pouvoir
constituant sur des populations soumises par la violence. Or,
cinquante ans de péquisme n'ont pas permis de le faire ni même de
se rapprocher de cette indispensable contestation. Cinquante ans de
péquisme n'ont pas permis de mettre le Canada sur la défensive, ne
serait-ce qu'une seule fois. On voit bien que la mise au rancart de
la nation canadienne française ne s'est pas traduite par une plus
grande pugnacité, bien au contraire. La montée d'un Québec
uni-national a occulté les traces de l'oppression primitive et ne
permet plus de se positionner en terrain solide pour contester les
survivances du colonialisme anglo-saxon. Le péquisme, toujours
complaisant avec le fédéralisme, n'a pas combattu le contentieux
historique qui fait de nous des subordonnés, une situation qui
évidemment ne peut être renversée en faisant fi de l'ignorer.
Du concept anglo-saxon de la nation péquiste
Le péquisme emprunte largement à la conception anglo-saxonne de la nation, une conception sur laquelle il a fini par s'aligner durablement. Dans ce cadre, la nation se confond avec l'État qui l'englobe. Une telle nation n'est qu'une projection mentale qui défie la réalité. On reconnaîtra ici la dominance de la dimension civique de la nation, qui va du haut vers le bas. En revanche, la conception « organique » de la nation, celle qui épouse la réalité et que nous revendiquons, s'élève du bas vers le haut et est formée à partir d'une communauté humaine socio-historique.
En pratique, la conception péquiste de l'émancipation de la nation - quand il en est question - s'exprime dans l'ambiguité et nous place sur une défensive perpétuelle. Son aboutissement politique est suspendu au consentement référendaire de la nation dite civique, composée d'au moins deux nations avec leurs intérêts divergents, qui lui donnerait enfin sa légitimité. À cet égard, si le besoin d'établir la légitimité de la néo-nation civique québécoise peut avoir un sens, en revanche, la légitimité des fondateurs du Canada, les Canadiens (f) n'est pas à établir. Elle relève de faits historiques avérés et de sa reconnaissance réitérée dans les actes officiels, notamment dans les débats constitutionnels pour faire accepter la Confédération par les « descendants des vaincus » en faveur des « descendants des vainqueurs ».
Le péquisme, qui a déplacé notre allégeance nationale pour la reporter exclusivement sur une créature juridique postérieure à la Conquête, The Province of Quebec - décrétée par George III avec la proclamation royale du 10 octobre 1763 - a consisté à placer sur la défensive les fondateurs du Canada. Au lieu d'exiger du Canada des réparations à ses injustices nous nous sommes imposés le fardeau d'une légitimité référendaire inutile. Ce déplacement de notre combat historique pour l'égalité des nations, devenu celui d'une souveraineté néo nationale fantasmée, est à la fois une imposture et une rupture. Il a créé des difficultés nouvelles à l'atteinte de l'égalité défendue par les nôtres depuis la Conquête. Le péquisme a créé un nouveau légalisme néo national, alors que la lutte traditionnelle s'appuyait sur une légitimité historique sans faille. Elle réclamait et réclame toujours que, plus de deux siècles et demi après la Conquête, les privilèges coloniaux soient effacés et que l'égalité promise en 1865 soit enfin mise en œuvre.
En pratique, la conception péquiste de l'émancipation de la nation - quand il en est question - s'exprime dans l'ambiguité et nous place sur une défensive perpétuelle. Son aboutissement politique est suspendu au consentement référendaire de la nation dite civique, composée d'au moins deux nations avec leurs intérêts divergents, qui lui donnerait enfin sa légitimité. À cet égard, si le besoin d'établir la légitimité de la néo-nation civique québécoise peut avoir un sens, en revanche, la légitimité des fondateurs du Canada, les Canadiens (f) n'est pas à établir. Elle relève de faits historiques avérés et de sa reconnaissance réitérée dans les actes officiels, notamment dans les débats constitutionnels pour faire accepter la Confédération par les « descendants des vaincus » en faveur des « descendants des vainqueurs ».
Le péquisme, qui a déplacé notre allégeance nationale pour la reporter exclusivement sur une créature juridique postérieure à la Conquête, The Province of Quebec - décrétée par George III avec la proclamation royale du 10 octobre 1763 - a consisté à placer sur la défensive les fondateurs du Canada. Au lieu d'exiger du Canada des réparations à ses injustices nous nous sommes imposés le fardeau d'une légitimité référendaire inutile. Ce déplacement de notre combat historique pour l'égalité des nations, devenu celui d'une souveraineté néo nationale fantasmée, est à la fois une imposture et une rupture. Il a créé des difficultés nouvelles à l'atteinte de l'égalité défendue par les nôtres depuis la Conquête. Le péquisme a créé un nouveau légalisme néo national, alors que la lutte traditionnelle s'appuyait sur une légitimité historique sans faille. Elle réclamait et réclame toujours que, plus de deux siècles et demi après la Conquête, les privilèges coloniaux soient effacés et que l'égalité promise en 1865 soit enfin mise en œuvre.
Un parti infiltré et qui ne s'en plaint pas
Finalement, le PQ, parti infiltré par les services de renseignements fédéraux, et qui ne s'en est jamais plaint, n'a jamais combattu le fédéralisme que mollement et de manière très occasionnelle. Il faut reprocher à la délégation péquiste qui représentait le Québec lors des négociations constituantes de 1981 à Ottawa, de n'avoir servi qu'à réclamer la sauvegarde de pouvoirs provinciaux. Notre délégation se sera tue sur l'essentiel et ne revendiquera jamais l'égalité des nations. Un recul majeur par rapport à la tradition. Y a-t-il un lien à faire avec le fait que le négociateur en chef du Québec était un agent des services de renseignements canadiens et l'absence d'ambitions de notre cahier constitutionnel ? Plusieurs estiment que oui. Nous y reviendrons plus loin.
La gauche, la droite, la dictature mondialiste et un peu de contexte personnel
Au
terme de mes dix chroniques je revendique la fin de l'intermède. Je
revendique la retour à notre nationalité canadienne. Notre
véritable acte de naissance. Je suis conscient que faute de pouvoir
se distinguer du conquérant, qui a usurpé notre identité (et on le
lui rappellera au passage !) il faudra se distinguer de lui en se
disant Canadiens-français. Avec un trait d'union pour marquer le
caractère insécable de cette identité. À ce sujet, ayant eu des
objections à droite, j'attends que l'on me taxe à gauche de
droitiste et d'identitaire, ce qui ne me fera aucun pli tant mes
antécédents sociaux ont été à gauche pour une moitié de ma vie.
Un peu de biographie aidera à me situer. Après avoir vu passer le général de Gaulle sur la rue Sherbrooke, j'ai été candidat communiste aux élections fédérales (Manicouagan) et provinciales (Duplessis) au début des années 1970. Après avoir lu Marx, Lénine, Staline et fait mes classes en variant mes lectures, j'ai été militant et organisateur syndical. Mon père, cheminot, lui-même délégué syndical, a combattu l'unilinguisme anglais au CN, au risque de représailles pour lui-même et sa famille. Il aura ouvert la voie pour le jeune Bernard Landry, dans son combat contre la discrimination personnifiée alors par Walter Gordon. Bref, j'en arrive à me situer sur la droite des valeurs ( conservateur - car tout anti globaliste ne peut être que conservateur ) et de la gauche du travail (car tout anti mondialiste ne peut être que pour l'équité sociale), un peu à la manière – retenez votre souffle - d'Alain Soral, qui vient de la gauche pour aboutir à une synthèse idoine, qui ne renie pas un certain marxisme attaché à la dialectique matérialiste - essentiellement philosophique. Une évolution qui rapproche de l'exigeant message évangélique.
Je revendique des ascendances trans-courants. Autant dire que je suis blindé contre les remontrances pudiques de la gauche sociétale et féministe, que je n'ai jamais soutenue, qui, après avoir trahi la lutte des classes, cause qui fondait sa légitimité, ne sait plus à quelle minorité exotique se vouer. Est-ce cela la gauche ? La gauche, plus bobo que prolétarienne, est devenue dans la plupart de ses expressions le bras droit du mondialisme.
Un peu de biographie aidera à me situer. Après avoir vu passer le général de Gaulle sur la rue Sherbrooke, j'ai été candidat communiste aux élections fédérales (Manicouagan) et provinciales (Duplessis) au début des années 1970. Après avoir lu Marx, Lénine, Staline et fait mes classes en variant mes lectures, j'ai été militant et organisateur syndical. Mon père, cheminot, lui-même délégué syndical, a combattu l'unilinguisme anglais au CN, au risque de représailles pour lui-même et sa famille. Il aura ouvert la voie pour le jeune Bernard Landry, dans son combat contre la discrimination personnifiée alors par Walter Gordon. Bref, j'en arrive à me situer sur la droite des valeurs ( conservateur - car tout anti globaliste ne peut être que conservateur ) et de la gauche du travail (car tout anti mondialiste ne peut être que pour l'équité sociale), un peu à la manière – retenez votre souffle - d'Alain Soral, qui vient de la gauche pour aboutir à une synthèse idoine, qui ne renie pas un certain marxisme attaché à la dialectique matérialiste - essentiellement philosophique. Une évolution qui rapproche de l'exigeant message évangélique.
Je revendique des ascendances trans-courants. Autant dire que je suis blindé contre les remontrances pudiques de la gauche sociétale et féministe, que je n'ai jamais soutenue, qui, après avoir trahi la lutte des classes, cause qui fondait sa légitimité, ne sait plus à quelle minorité exotique se vouer. Est-ce cela la gauche ? La gauche, plus bobo que prolétarienne, est devenue dans la plupart de ses expressions le bras droit du mondialisme.
Mais,
faut-il le préciser, l'éducation politique et l'éducation tout
court sont en déshérence. La fin de tout esprit critique, l'effondrement de la réactivité populaire menacent l'humanité, qui n'apprend plus à l'individu autre chose que de
s'identifier à son nombril. Je n'écris pas ces lignes pour soulever
une polémique secondaire, une diversion inutile. Ne me revenez pas
sur ces confidences. Elles ne sont pas le coeur de mon propos, je me livre un peu pour donner du contexte et mettre en
lumière, par contraste, que l'extrême droite aujourd'hui est
constituée par le 1 % qui forme le noyau d'une dictature mondiale,
dont la mise en oeuvre requiert qu'on poursuive inlassablement
l'affaiblissement des souverainetés nationales.
Nous
sommes des créateurs d'alliances
Par
conséquent, il ne faut entretenir aucune mauvaise conscience à
défendre le droit de vivre d'une petite nation née honorablement
sur les rives du Saint-Laurent et qui s'est vite déployée sur les deux tiers du continent, une nation formée à partir d'un noyau ethnique assez
homogène venu du Royaume de France. La découverte de l'Amérique,
une colonisation avant la lettre qu'il faut reconnaître comme un
phénomène
inévitable,
concerne cinq pays d'Europe. Parmi les cinq, la Nouvelle-France ne
ressemble pas aux autres. Inlassablement calomniée, c'est pourtant
l'établissement qui a le mieux réussi, et de loin, sa
relation avec les peuples indigènes. Dire que « Ton histoire est
une épopée » n'est pas un ver surfait de Basile Routhier. Notre
histoire primitive est celle d'une collaboration étroite et
fructueuse avec les peuples autochtones et notre intérêt mutuel
serait de recréer et de mettre à jour ce lien historique que la
Conquête aura mis plus de cent ans à détruire avec la pendaison
de Louis Riel. Les Premières nations ne rechigneront pas à l'idée
de l'égalité des nations au Canada.
* * *
Une
doctrine de l'État du Québec ?
Permettez-moi
de vous mettre en copie d'un échange avec un correspondant, le texte
plus bas. Mon correspondant voit chez Daniel Johnson, l'homme du
livre Égalité
ou indépendance, (1967) et premier ministre du Québec, le fondateur d'une
doctrine de l'État.
On voudrait bien trouver dans un passé pas si lointain des matériaux pour aujourd'hui. Mais je vous pose la question. Pour conduire l'État avec notre propre doctrine, ne faudrait-il pas d'abord partager cette doctrine nationale dans nos rangs ? Une doctrine d'État nationale peut elle être autre chose que l'émanation d'une politique nationale ? Or, Johnson était seul au sein de son parti et sa mort prématurée l'emporta avec son ambition. Il laissa en souvenir quelques gestes politiques hors norme et un livre, mais pas de continuateurs. Pire, son successeur lui tournera le dos avec une tentative de redéfinir l'équilibre linguistique en faveur des anglophones. Chef de l'Union nationale de 1961 à 1968, Daniel Johnson était marqué par la fidélité aux valeurs du Canada-français catholique, mais il échouera à passer ses propres valeurs à ses fils, Pierre-Marc et Daniel. Ces derniers, plus travaillés par les ambitions du matérialisme anglo-protestant que par l'intérêt national, tourneront le dos à leur père. Cette rupture se répète entre Léon Dion et son fils Stéphane, et je pourrais citer d'autres cas, y compris dans ma propre famille. C'est ça le Québec n'est-ce-pas ? Ce Québec qui a surtout tenu mordicus à se déclarer indépendant du Canada-français dans l'ingratitude de l'oubli. Dans les années 1960, le Québec disposait de beaucoup d'atouts, mais il confondit son émancipation des survivances du colonialisme anglo-saxon avec un rejet - parfois mâtiné de haine - de son appartenance à la tradition canadienne-français et de l'influence du père. La succession des passeurs sembla s'arrêter avec une forme locale de révolution colorée, vaguement reproduite depuis celle expérimentée à Paris dès mai 1968. Le phénomène Johnson passera comme un épisode atypique, sans continuité. Un livre ne fait pas une doctrine.
On voudrait bien trouver dans un passé pas si lointain des matériaux pour aujourd'hui. Mais je vous pose la question. Pour conduire l'État avec notre propre doctrine, ne faudrait-il pas d'abord partager cette doctrine nationale dans nos rangs ? Une doctrine d'État nationale peut elle être autre chose que l'émanation d'une politique nationale ? Or, Johnson était seul au sein de son parti et sa mort prématurée l'emporta avec son ambition. Il laissa en souvenir quelques gestes politiques hors norme et un livre, mais pas de continuateurs. Pire, son successeur lui tournera le dos avec une tentative de redéfinir l'équilibre linguistique en faveur des anglophones. Chef de l'Union nationale de 1961 à 1968, Daniel Johnson était marqué par la fidélité aux valeurs du Canada-français catholique, mais il échouera à passer ses propres valeurs à ses fils, Pierre-Marc et Daniel. Ces derniers, plus travaillés par les ambitions du matérialisme anglo-protestant que par l'intérêt national, tourneront le dos à leur père. Cette rupture se répète entre Léon Dion et son fils Stéphane, et je pourrais citer d'autres cas, y compris dans ma propre famille. C'est ça le Québec n'est-ce-pas ? Ce Québec qui a surtout tenu mordicus à se déclarer indépendant du Canada-français dans l'ingratitude de l'oubli. Dans les années 1960, le Québec disposait de beaucoup d'atouts, mais il confondit son émancipation des survivances du colonialisme anglo-saxon avec un rejet - parfois mâtiné de haine - de son appartenance à la tradition canadienne-français et de l'influence du père. La succession des passeurs sembla s'arrêter avec une forme locale de révolution colorée, vaguement reproduite depuis celle expérimentée à Paris dès mai 1968. Le phénomène Johnson passera comme un épisode atypique, sans continuité. Un livre ne fait pas une doctrine.
La prochaine élection. : la modération des transports s'impose
De doctrine nationale ? Je pense que nous nous sommes égarés comme peuple et que nous ne disposons pas d'une telle doctrine. Pas de doctrine de ralliement sur la façon de défendre nos intérêts; pas davantage sur un sens de l'État et du pays à transmettre; pas plus sur un corpus suffisamment partagé au sein d'une élite respectable et validé sociologiquement. Par conséquent, comme certains le font valoir, les prochaines élections ne peuvent pas nous donner le pouvoir ni le contrôle de l'État. Réduites à la politique du spectacle, les élections sont évidées des grands enjeux et se plient au conformisme exigé par les chefs de campagne, sortes de chefs d'orchestre de la politique spectaculaire. Si les élections peuvent rétablir une certaine moralité publique, un peu plus d'éthique en politique, mettre un frein à la corruption et à la collusion, faire la lumière sur de ténébreuses affaires, ce qui reste à voir, on ne pourra que s'en réjouir. Mais, pour ce qui concerne notre avenir national, on aurait tort de croire que l'élection d'un parti plutôt qu'un autre sonnera le début d'un temps nouveau. De tous les partis confondus, et c'est là l'essentiel, on s'abstiendra de remettre en cause le droit de désaveu de la majorité détenu par la puissante minorité du West Island, adossée à la toute puissance de l'État Canadian. Nous sommes loin de pouvoir accréditer une idée défendue par certains, dont Vigile, que l'élection d'un gouvernement du Parti québécois défendrait nos intérêts ou établirait une doctrine de l'État national patriotique, cela n'a jamais existé au sein de l'État profond du Québec. Nous sommes loin du compte.
Alimenter petit à petit un nouveau paradigme
Selon
moi, qui se trouve fort dépourvu de moyens compte tenu de l'ampleur
de la tâche, il faudrait se regrouper petit à petit, puis
massivement, sur des bases nouvelles. C'est ce
que je proposais à Option nationale à
la veille de sa dissolution et c'est ce que je propose au Bloc
québécois aujourd'hui. Alimenter un nouveau paradigme pour
contester dans tous ses aspects la façon dont la question nationale
a été posée depuis cinquante ans. Un projet qui se justifie pour
la bonne raison que l'oblitération de notre histoire et de nos
traditions - qui devaient certes évoluer, j'en conviens - ne nous a
été d'aucun secours. Ce n'était qu'un long détour. En 2018, en
dépit des faits qui l'accable, l'esprit souverainiste reste toujours
assez imperturbable, attaché à ses lubies. Il se conforte dans un
déni tenace, résiste à prendre acte que les cinquante dernières
années nous ont plus atteints dans notre potentiel national que tout
le premier centenaire de la Confédération.
L'égalité, cette revendication qui contient tous les formats possibles
L'égalité, cette revendication qui contient tous les formats possibles
Après avoir réclamé
l'égalité, puis la souveraineté, puis l'indépendance - cette
dernière présentée comme une coche au-dessus - avec quoi
pourrions-nous maintenant renchérir ? Il s'avère que nous nous
sommes beaucoup payés de mots. On aurait pu s'arrêter à l'égalité, « dret là ». Une revendication qui contient tout. Et c'est peut-être ce qu'il
nous faut retenir de Daniel Johnson. Mais au lieu de réclamer
l'égalité avec force, nous nous sommes engagés dans une fuite en
avant marquée par une surenchère verbale, surplombée d'inutiles
saillies référendaires : ça passe ou ça casse, pour finalement
exploser en vol, comme dans la célèbre fable de la grenouille qui
voulait se faire aussi grosse que le boeuf.
Mes amis, il aurait mieux valu parler modestement et agir fermement. Revendiquer l'égalité constitutionnelle et ne jamais céder. Mais, au lieu de la fermeté nécessaire, qui nous aurait fait questionner la domination de type colonial d'Ottawa dans le cadre du processus constituant dont nous étions partie prenante, nos représentants n'ont pas osé répéter à Ottawa les paroles de leurs beaux discours souverainistes. Là-dessus ils se sont tus. Je le répète, sans même parler d'indépendance, n'est-il pas exact que le tandem Lévesque-Morin n'a pas réclamé l'égalité des nations en 1981 ? N'est-il pas exact qu'il s'est satisfait de revendiquer le maintien d'acquis provinciaux ? Et que c'est à l'issue de cette négociation sans ambition que le Québec a refusé de signer la constitution ? Revenant d'Ottawa en Tartuffe indigné, parce qu'il avait été trahi - tant prévisible - par un front commun des provinces que Claude Morin avait formé, Lévesque fouetta ses partisans avec des mots habiles, des mots forts, mais que des mots. Il souffla le chaud dans un premier temps, puis constatant que cela marchait trop bien, il refroidira ceux qui, selon ses paroles célèbres, étaient « quelque chose comme un grand peuple », un peuple qu'il aura pourtant refusé de mobiliser au moment décisif. En homme modéré, réfractaire à tous les excès - sauf ceux du fédéral - il fera retomber le soufflé quelques mois plus tard. Apprit-il de Claude Morin ou était-il de mèche avec lui ?
Mes amis, il aurait mieux valu parler modestement et agir fermement. Revendiquer l'égalité constitutionnelle et ne jamais céder. Mais, au lieu de la fermeté nécessaire, qui nous aurait fait questionner la domination de type colonial d'Ottawa dans le cadre du processus constituant dont nous étions partie prenante, nos représentants n'ont pas osé répéter à Ottawa les paroles de leurs beaux discours souverainistes. Là-dessus ils se sont tus. Je le répète, sans même parler d'indépendance, n'est-il pas exact que le tandem Lévesque-Morin n'a pas réclamé l'égalité des nations en 1981 ? N'est-il pas exact qu'il s'est satisfait de revendiquer le maintien d'acquis provinciaux ? Et que c'est à l'issue de cette négociation sans ambition que le Québec a refusé de signer la constitution ? Revenant d'Ottawa en Tartuffe indigné, parce qu'il avait été trahi - tant prévisible - par un front commun des provinces que Claude Morin avait formé, Lévesque fouetta ses partisans avec des mots habiles, des mots forts, mais que des mots. Il souffla le chaud dans un premier temps, puis constatant que cela marchait trop bien, il refroidira ceux qui, selon ses paroles célèbres, étaient « quelque chose comme un grand peuple », un peuple qu'il aura pourtant refusé de mobiliser au moment décisif. En homme modéré, réfractaire à tous les excès - sauf ceux du fédéral - il fera retomber le soufflé quelques mois plus tard. Apprit-il de Claude Morin ou était-il de mèche avec lui ?
Comment Robert Bourassa - dans un cas d'école de démission égale à celles du PQ - nous donne par l'intermédiaire d'acteurs directs (André Tremblay et Diane Wilhelmy) la mesure de ce qu'il faut de préparation et de détermination - sans compter la nécessité d'organiser l'appui populaire - pour tenir le fort, faire face à la machine de guerre canadienne dans des négociations constitutionnelles. Le problème de la sous-performance constitutionnelle chronique du Québec, de sa négligence dans la préparation de sa défense, forme la trame des événements officiels qui marquent nos reculs historiques enregistrés depuis la Confédération. Il est clair que Lévesque, Bourassa et Parizeau n'étaient pas de taille. C'était certes des hommes d'envergure dans un sens, était-ce le fait d'une longue domination anglo-saxonne ? ils n'avaient ni la préparation mentale ni le dispositif politique pour affronter ces ogres. Comme Georges-Étienne Cartier, ils se sont faits bouffer tout rond.
Dans cette continuité
caricaturale du tandem Lévesque-Morin, c'est en direct que l'on assista en 1995 au suicide
politique du commandant en chef du camp du OUI. Spectacle affligeant
que cette déclaration mettant fin au combat alors qu'il aurait fallu
sonner l'hallali. La nation canadienne-française ne venait-elle pas
de se prononcer à 60 % sur son avenir ? Nettement en faveur d'un
changement constitutionnel ! Mais la québécitude empêchait tout.
Le Québec nation, tristement inclusif, assimilé à l'autre à qui
il consent un droit de veto sur son destin, refusant
son identité canadienne-française, nous prive - depuis le PQ - de
la possibilité de faire toute distinction entre les deux nations qui
forment le Québec. On fera notre indépendance avec le Canada
anglais ou on ne la fera pas ! Le piège à homards s'est bel et bien
refermé sur nous. C'est le principal résultat du néo-nationalisme
moderne.
Le nationalisme civique a mis fin à la lutte de nation à nation
Il est facile de le dire
aujourd'hui, mais pour le bénéfice d'une illustration de l'emprise
du nationalisme civique, si ce dernier avait été moins dominant
dans le référendum, Parizeau aurait eu la liberté de réclamer
immédiatement l'ouverture de nouvelles négociations
constitutionnelles sur la base de l'égalité des nations
socio-historiques. Une manière élégante de renchérir en renvoyant
la balle dans le camp d'en face. Le nationalisme civique, on le voit,
a mis fin à la lutte de nation à nation.
Un auto-sabotage qui a trop duré
Encore une fois, selon une tradition récente mais déjà bien établie par le tandem Lévesque-Morin, faute de mener un combat opiniâtre pour l'égalité constitutionnelle, il nous faut procéder à de ponctuels assauts improvisés - à la don Quichotte - pour ensuite sombrer dans la passivité et la déprime. Le cul de sac que reconnaît Jean-François Lisée qui a renoncé officiellement à traiter de la question existentielle. Un auto-sabotage national qui dure depuis cinquante ans et qui ne fait qu'empirer.Une sous-performance en négociations constitutionnelles
Avec
Lévesque-Morin, on s'est payé un luxe que nous n'avions pas, le
luxe de sous-performer misérablement dans les négociations
constitutionnelles, pour
néanmoins réclamer confusément une indépendance de pacotille dans
un discours public parallèle et déconnecté. C'est ce que le Québec
a fait. Ironiquement, le seul qui est allé au bout d'un processus
constitutionnel en 150 ans apparaît être Robert Bourassa, un
libéral. Ce n'est qu'une fois ce processus effondré, l'accord du
lac Meech, qu'il a manqué du courage nécessaire pour donner
une suite
concrète à sa déclaration du 22 juin 1990.
Une
« pédagogie de l'indépendance » qui pédale dans la purée
Il
faut lire le dernier
texte de Denis Monière,
pour comprendre la persistance des mêmes contradictions. Après
quelques constats assez justes, Monière lance un appel au combat,
mais ce qu'il propose est loin d'en être un. Il propose « la
persuasion », « la promotion d'une idée » et des moyens pour le faire. Il
rate totalement la cible quand il propose de poursuivre dans « la
pédagogie de l'indépendance » dans le vide. Il faut sortir l'indépendance de la scolarité. Ne se rend-il pas
compte que la seule pédagogie de l'indépendance qui vaille est
celle qui est soudée au combat réel ? En fait, rien d'autre que de regrouper nos forces pour forcer de vraies
contestations constitutionnelles et de vraies négociations
constitutionnelles en vue de l'égalité des nations. M.
Monière, qui est politologue, ne semble malheureusement pas accorder
d'importance au fait que l'indépendance est une question de statut
et que les questions statutaires sont d'ordre constitutionnel. Aucun
changement de statut ne peut être réalisé - sauf par la révolution
- sans des négociations en bonne et due forme au cours desquelles
les « descendants des vaincus » se présenteront en égaux pour
réclamer l'égalité. C'est à la faveur de ce processus - où la
fameuse pédagogie sortirait de son carcan académique - que l'éducation
populaire pourrait conduire à la mobilisation politique. Beaucoup
ont objecté que le Canada n'acceptera jamais, à ceux-là il faut répondre que nous n'avons jamais
essayé. Je ne répugne pas à demander aux morts que sont Lévesque, Bourassa et Parizeau, pourquoi n'avez-vous essayé qu'à moitié ?
La révocation de la constitution
À cet égard, il faut se
demander si la révocation de la constitution de 1982 pour causes
d'irrégularités, dont - entre autres - le fait qu'un agent des
services secrets se trouvait à la tête de la délégation du Québec
ne serait pas une revendication justifiée. C'est ce type de dossier
à charge, à soumettre ultimement à des instances internationales,
qui inverserait une pédagogie de l'indépendance qui tourne à vide
pour la remplacer par la mobilisation politique. Avec cet argument
on commencerait à mettre en place une justification à la reprise
des négociations de 1981, comme si elles n'avaient jamais eu lieu.
Un peuple égal dispose
de tous les droits
La thèse de Daniel Johnson était que la lutte pour l'égalité finirait par laver les conséquences de la conquête d'une façon ou d'une autre. Cette thèse n'a rien perdu de sa fraîcheur. Un peuple égal dispose de tous les droits. Tous les droits, soit celui d'entrer dans un contrat fédéral basé sur l'égalité ou de ne pas le faire. Johnson a été utile au Québec, il a été un important représentant du nationalisme traditionnel enraciné, pour qui le processus qui mène à l'égalité prime sur la forme politique particulière qu'elle pourrait revêtir à l'issue du processus. Une optique qui a été remplacée au PQ par une approche plus conflictuelle, qui tenait pour acquis que le Canada n'est pas réformable, un a priori dont il négligea de faire la preuve en refusant de s'engager sérieusement et jusqu'au bout dans tout processus constitutionnel. Voilà où nous en sommes.
La thèse de Daniel Johnson était que la lutte pour l'égalité finirait par laver les conséquences de la conquête d'une façon ou d'une autre. Cette thèse n'a rien perdu de sa fraîcheur. Un peuple égal dispose de tous les droits. Tous les droits, soit celui d'entrer dans un contrat fédéral basé sur l'égalité ou de ne pas le faire. Johnson a été utile au Québec, il a été un important représentant du nationalisme traditionnel enraciné, pour qui le processus qui mène à l'égalité prime sur la forme politique particulière qu'elle pourrait revêtir à l'issue du processus. Une optique qui a été remplacée au PQ par une approche plus conflictuelle, qui tenait pour acquis que le Canada n'est pas réformable, un a priori dont il négligea de faire la preuve en refusant de s'engager sérieusement et jusqu'au bout dans tout processus constitutionnel. Voilà où nous en sommes.
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Document
[ Je commente les propos d'un correspondant qui revient sur Égalité ou indépendance de Daniel Johnson. Mes commentaires sont en jaune - GV ]
L’AMBIVALENCE DE LA POSITION CONSTITUTIONNELLE
DE DANIEL JOHNSON
Avant
d’examiner ce qu’il faut retenir de la doctrine politique et du
cadre stratégique que Daniel Johnson a résumé dans son livre
Égalité ou indépendance. Il convient de revenir à son véritable
objectif de sa stratégie pour le clarifier : fédéralisme renouvelé
ou indépendance ?
Est-ce vraiment la bonne façon d'aborder la question nationale ? Cette façon impose en partant de se prononcer sur la « plomberie » plutôt que de s'attacher à l'essence, soit la nature du contentieux national lui-même ?
Cette
ambivalence a confondu la grande majorités des observateurs qui ne
croyaient pas que Daniel Johnson était indépendantiste, et qu’il
n’agitait cette menace qu’à des fins de négociation
constitutionnel. Même certains de ses proches conseillers étaient
perplexes sur sa véritable position constitutionnelle. C’était
le cas de Claude Morin :
«
Claude Morin qui lui demandait d'éclairer sa lanterne. Johnson
répond : “Lisez mon livre Égalité ou indépendance et vous
comprendrez où je m'en vais, monsieur Morin.” Celui-ci suit le
conseil, mais reste perplexe. La lecture de « l'évangile selon
saint Daniel ne lui permet pas d'en arriver à une compréhension
claire de la position constitutionnelle de son patron. Veut-il, oui
ou non, l'indépendance ?
Selon
l’ex député de l’Union Nationale, Antonio Flamand, lequel avait
joué un rôle important pour faire cheminer Daniel Johnson vers
l’option de l’indépendance, ces convictions ne faisaient aucun
doute. L'ambivalence de ce dernier tenait à son appréciation
correct des rapport de forces en présence à l’époque.
On ne peut honnêtement affirmer que le rapport de force nous favorise plus aujourd'hui qu'à l'époque. Les deux référendums et notre défaut à soulever les questions de fond, à l'occasion de la constituante d 1981, et lors des négociations du lac Meech, ont aguerri le régime fédéral face à nos revendications farfelues dans les discours, jamais suivies de gestes conséquents aux tables de négociation. Le régime en a profité pour nous rabattre davantage.
(...)
Selon Jacques Parizeau, la stratégie de Johnson, était parfaitement adapté au contexte de l’époque : Dans son livre Pour un Québec souverain, Parizeau qualifia l’ouvrage de Johnson d’ « [...] idée géniale parce qu’elle correspondait tellement bien à ce que tant de gens souhaitaient : l’égalité ou l’indépendance. »
Autre
grand personnage qui a validé la stratégie de Daniel Johnson, le
Général Charles de Gaulle lui-même. Lequel avait lu Égalité ou
indépendance et suite à de longs entretiens, avait accepté
de jouer le grand jeu lors de son mémorable voyage en 1967. On
imagine mal le Général se prêter à une stratégie proposée par
un politicien dont il n’aurait pas testé les convictions.
La
stratégie de Johnson était adapté au contexte de l’époque.
Rappelons que l’appui à l’indépendance était à 10 % dans la
population, et ; que son propre caucus était majoritairement contre
lui. Aux indépendantistes pressés qui lui demandaient de se
commettre plus clairement pour l’indépendance, son biographe nous
rapporte sa réponse :
Selon
ce que rapporte Godin sur la position de Johnson : « Il y a
deux façon de faire l’indépendance, [...]. On peut la faire sans
le dire. Ou annoncer ses couleurs au risque de ne jamais la faire. En
politique, il faut éviter les difficultés inutiles. La population
n’est pas mûre pour entendre le langage de l’indépendance, elle
va nous vomir.
Était-ce nécessairement l'un ou l'autre ? Le braquage de l'opinion sur l'égalité ou l'indépendance ne nous ferait-il pas perdre l'essentiel, l'essentiel c'est d'accéder à l'égalité nationale. L'indépendance, surtout quand on est incapable de la faire, ne fait que rejeter péremptoirement les formes possibles que peut prendre l'égalité. Elle fait aussi oublier que l'indépendance ne peut arriver qu'une fois épuisés toutes les ressources et les moyens de la négociation. N'aurait-on pas eu avantage – pour mettre les choses dans ce qui pourrait être la bonne perspective – à être absolument intraitables sur l'exigence d'égalité des nations, et flexibles, ouverts, ( exclure le mot ambigüe ) sur la forme politique que celle-ci pourrait prendre au bout du processus ? Pourquoi avoir voulu décider de nos options avant de négocier ? D'ailleurs, il était et il serait encore aujourd'hui beaucoup plus difficile d'attaquer la légitimité d'un combat pour l'égalité qu'une revendication d'indépendance, qui sera immanquablement reçue par une levée de boucliers des opposants à la menace séparatiste et sécessionniste.
Nous avons utilisé un vocabulaire audacieux dans les discours populaires qui ne s'est jamais rendu aux tables de négociations. Par conséquent, nous n'avons jamais pu rendre sérieux et crédible ce discours. Ce faisant, nous avons néanmoins donné à nos maîtres tous les prétextes pour nous étouffer davantage. Il faut l'admettre, on ne s'est jamais donné la peine de revendiquer l'égalité avec opiniâtreté, avec en main un dossier constitutionnel blindé et historiquement inattaquable.
La revendication de l'égalité nationale ne plaît pas aux tenants du nationalisme civique territorial pour qui - dans la conception anglo-saxonne- la nation est l'État du Québec, composée de ceux qui habitent le territoire. Pour les gentils civiques, nous sommes dans un conflit d'ajustements entre une province et un pays et non dans un conflit entre nations sociohistoriques.
Pour
Johnson la stratégie consistait, en partant de très loin par
rapport à l’objectif finale, à influencer la dynamique
politique, et par étape, l’amener à son objectif finale :
l’indépendance.
La
première étape dans le contexte des négociations
constitutionnelles étant pour lui, l’égalité.
C'est une grave erreur de qualifier l'égalité comme une étape, l'égalité peut très bien représenter l'objectif final, dont les modalités politiques peuvent se passer d'être arrêtées avant même que le processus soit engagé.
Dernier point, un BONUS : Revendiquer l'égalité est un combat auquel toutes les victimes de la constitution hégémonique et semi-coloniale du Canada peuvent s'identifier : Acadiens, premières nations, etc. Au lieu de n'avoir que des ennemis, nous pourrions avoir des alliés. Les alliances avaient fait la fortune de la Nouvelle-France, pourquoi ne ferait-elle celle de ses continuateurs ?
--
Gilles
Verrier
1 commentaire:
Hier matin, je lisais votre utilisation du mot déshérence à la fin d'une chronique.
Serait-il possible de me l’acheminer personnellement puisqu’elle n’est plus disponible ?
Le sens de l'appellation de ce mot semblait très opportun et fort signifiant.
Merci et bonne soirée.
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