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Dix ans et tant qu'il en faudra

Québécois n'avait pas d'histoire... François-Albert Angers (1980) La disparition des nations ne nous appauvrirait  pas moins  que si...

jeudi 13 mars 2025

Dix ans et tant qu'il en faudra

Québécois n'avait pas d'histoire...
François-Albert Angers (1980)

La disparition des nations ne nous appauvrirait 
pas moins que si tous les peuples étaient faits pareils, 
avec un même caractère, un même visage.
Alexandre Soljenytsine
(m-à-j le 15-03-25-00:53)

CanadiEn au passé, au présent et au futur
Il y a dix ans aujourd'hui, je lançais ce blogue sans trop savoir si l'aventure était pour durer. J'invitais tout de même les lecteurs à s'y abonner, à faire ce petit geste. Dix ans plus tard, les archives du Blogue comptent 292 articles. Accessibles par mots clés, ils constituent le témoignage de ma propre extraction des méandres d’un souverainisme-trudeauiste mortifère, en même temps une banque de données sur le sujet.
 
L'étonnement est la première réaction de plusieurs quand ils voient que mon blogue a pour nom Fédération des Canadiens-Français. Quand la lecture du titre n'est pas immédiatement suivie d'un rejet, elle peut être le départ d'une découverte totale pour ceux qui s'aventurent plus avant. Ils pourraient réaliser que le sujet n'est pas le folklore, que la nostalgie du passé y est rare. 

Pour l'essentiel, mon blogue se voue à l'actualité contemporaine d'un peuple qui s'est formé il y a quatre cents ans. Mon objectif est de faire le point sur son état, mon espoir est de l'armer au mieux pour qu'il s'émancipe des influences « défuntisantes. » Et quand il est question de notre histoire, ce sera pour parler des assises qu'elle offre en héritage à ceux qui travaillent à défricher avec moi les voies de l'avenir. Mais l'avenir ? L’avenir de qui au juste ? Parlons des Canadiens. 
Canadien, un nom propre invariable ?

Le gentilé canadien aurait bien pu échapper à toute équivoque sur son sens. Je pense qu'il aurait suffi, vers 1850, que nos ancêtres fassent du vocable canadien un nom propre invariable, qu'il s'écrive et se dise pareil en français et en anglais. De ce fait, ils auraient érigé une barrière difficile à franchir contre l'usurpation de notre nom. Faute de cette barrière, le nouveau nationalisme libéral de la Révolution tranquille a abdiqué devant l'usurpation, il a refusé de poursuivre le combat. L'identité québécoise qui a fini par s’imposer. Elle s'est révélée comme le résultat déplorable d'un manque de persévérance dans l'être collectif.  

Les Canadiens-Français sont-ils devenus des Québécois ?
On va même jusqu'à dire que les Canadiens-Français sont devenus des Québécois. En réalité, cette formule trahit un regrettable manque de rigueur. Mettons les choses au clair une fois pour toutes. Les Québécois sont les habitants de la province de Québec, au même titre que les habitants de l'Ontario sont des Ontariens. Si les Québécois forment un peuple qui veut conserver sa langue, la langue que l’on veut conserver n’est pas la même pour tous... N'est-ce pas ? Les Québécois se divisent entre deux peuples principaux. Et dans les deux cas, il faut l'admettre, leur occupation du territoire dépasse les frontières du Québec. On ne peut rien contre la réalité. 

L'engouement pour un pays appelé Québec a bien eu pour projet de réunir la dualité identitaire. Le projet a échoué. On a bien voulu croire qu'une identité québécoise cohérente pouvait naître de la magie référendaire. Mais le mythique acte fondateur a fait plouc ! Les référendums n'ont fait que révéler de nouveau ce qu’on savait déjà : l'existence de deux peuples. Le premier issu de Nouvelle-France, le second issu de la Conquête. Mais l'État du Québec refuse d’en prendre acte. Il continue de nous vendre des vessies pour des lanternes, tel que dans la loi 99 (2000)

Qui a fait disparaître le peuple fondateur ?  
Rappelons-le. Le mot canadien est mentionné 8 fois dans les Articles de Capitulation de Québec et de Montréal. Le mot Canada y est mentionné 15 fois et le mot Acadien (parfois écrit Accadien) 4 fois.
Mais qui sont ces Canadiens et ce Canada dont il est question en 1759 et en 1760 alors que les Anglais viennent juste de débarquer ? Où sont-ils ? Que sont-ils devenus ? Sont-ils solubles dans la macédoine québécoise décrite dans le préambule de la Loi 99 (2000) ? 

Après avoir défendu longtemps notre propriété exclusive du nom Canadien, à un tournant, la bonne foi voulut qu’on souhaite partager notre nom. Henri Bourassa croyait à deux nations égales dans la Confédération.  Partager notre nom, en faire le nom composé tel que Canadien-Français n’était pas un renoncement mais un pari. On peut en rire, mais il était pris au sérieux à l’époque. De là, ne nous trompons pas. C’est bien la Révolution tranquille et le libéralisme d’Après-guerre qui s’engagent dans le renoncement avec pour conséquence la réassignation identitaire tous azimuts. 

Référendum et réassignation identitaire 
L’idéologie référendaire est au service d'une funeste réassignation identitaire. Elle redéfinit la nation historique pour la réduire aux limites du Québec. La logique du référendum continue avec la mise à l’écart des Canadiens français hors Québec et des Acadiens pour, en revanche, aller conquérir le cœur de nos anglophones et les convertir en compatriotes québécois. A-t-on perdu la tête ? 

Tout ça pour des motifs idéologiques tenus pour moralement supérieurs. Or, Québec ou Ottawa n’ont jamais eu pour mandat de réviser les références identitaires du peuple. On l'avait fait jadis pour les Indiens, ce qu'on juge aujourd’hui répréhensible et est condamné en droit international, ce qui a fait plier le Canada. 

On se souviendra qu'en 1969, P.E. Trudeau dans un discours à Vancouver, s’opposait à tout droit particulier pour les autochtones. Mais le Canada a persisté dans l’injustice. Il l’a fait avec le démembrement par provinces et la réassignation identitaire des Canadiens-Français, une opération commencée en 1969. Au Québec, on agissait à l’inverse avec la tentative de souder ensemble deux peuples inégaux, séparés depuis le Traité de Paris (1763) pour faire d'eux une "nation québécoise". 

Quelle solution pour la question nationale ?
Une solution politique de la question canadienne et acadienne doit non seulement prendre en compte les réalités territoriales, elle doit aussi prendre ses distances de l'ingénierie sociale, laquelle n'est jamais bien loin d’outrepasser les prérogatives limitées de l’État. La juste résolution du rapport entre les deux peuples principaux du Canada ne peut faire abstraction de l’héritage du passé. Les francophones des autres provinces ne sont pas que des "minorités linguistiques provinciales". Ils sont issus d’un peuple qui a été remanié par la force du pouvoir fédéral. C’est un peuple minoritaire d’un océan à l’autre, qu’on a privé de son intégrité, de ses droits et des protections qui s’appliquent aux peuples conquis et sans statut. Les Premières Nations ont eu gain cause après avoir connu les abus du régime anglais. Il faudra voir ce qu’on peut faire en suivant une démarche semblable contre le même régime. Cour supérieure, cour suprême, Nations unies.

La nation ethnique préférée du
Bloc Québécois

La demande de modifications à la Loi 99 (2000)
Pour le moment, après cinq ans à réclamer sans succès un amendement à la Loi 99 (2000) pour inclure les Canadiens-Français aux diverses entités qui composent ledit peuple québécois, le temps est peut-être venu de passer à une autre étape. Reconnaissons d’abord un fait. Le manque de retentissement de la demande formulée par la Fédération des Canadiens-Français, rendue publique au vingtième anniversaire de la loi, en décembre 2020, tient sans doute à l’indifférence des souverainistes. Un trop grand intérêt pour la nation civique peut distraire de la nation organique, celle qui nous a vus naître. 

C’est une fuite en avant que l’on ne peut que déplorer. 
Mais je me demande bien pourquoi s’inquiéter. La reconnaissance de la nation canadienne-française par Québec ne retirerait rien à la pertinence de la souveraineté pour qui voudrait s’y consacrer. Mais il semble encore que toute référence à la nation ethnique, si elle n’est pas associée à Israël ou aux Ouïghours, agit comme un repoussoir. Si je mentionne les Ouïghours, c’est que le Bloc québécois en a fait sa cause ethnique préférée, à des milliers de kilomètres du Québec. Mais pour qui veut rendre de précieux services, comme le Bloc, la distance n’a pas d’importance ! Il est clair que notre cause repousse d’autant plus, dirait-on, tant il s’agit de celle d’un petit peuple en résistance à l’excellentissime hégémonisme anglo-saxon. Pour précision, ethnique veut dire sociologique et culturel. 

Des procédures en droit 
À ce stade, on discute dans les cercles intéressés de la préparation d’un réquisitoire qui va prouver, pas à pas, prenant les textes officiels, l'existence et la continuité historique des Canadiens issus de Nouvelle-France. C’est un gros travail qui, pense-t-on, pourrait déboucher sur la contestation juridique de la Loi 99 à un niveau. Suivrait la réclamation de nos droits nationaux à tous les niveaux supérieurs. 
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