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lundi 19 juin 2023

La Saint-Jean-Baptiste et les mécanismes compensatoires d'un peuple frustré de ses ambitions légitimes

Fête patriotique des Canadiens-Français
Grâce à Ludger Duvernay, à partir de 1834, la Saint-Jean devient la fête patriotique des Canadiens-Français. À une époque plus récente, on a conclu que l’image bucolique de Jean-Baptiste, personnifié par un jeune berger et un mouton, ne représentait plus adéquatement un peuple urbanisé qui voulait réaffirmer son identité. On a remplacé l’enfant par un Jean Baptiste adulte, puis par des déploiements artistiques d’envergure qui symbolisaient le passage d’un peuple à la maturité. Mais les masses peuvent-elles accéder à la maturité ? Ce sont des chefs charismatiques qui les inspirent et qui les marquent, mais pas forcément avec une rationalité conséquente.


Un "national" qui fait illusion
Un phénomène de compensation dans l’ordre symbolique peut adoucir le sort peu enviable d’un peuple frustré de s’être vu refuser toutes ses réclamations de réformes constitutionnelles. Vus sous cet angle, les changements successifs apportés à la Saint-Jean-Baptiste, élevée au rang de « fête nationale » font illusion. On s'est félicité d’être passé du petit Canadien-Français au Québécois plus émancipé, mais en même temps, et non sans contradiction, c'est la cohésion et la puissance nationale qui se dégradaient à un rythme accéléré.
Une filiation non dissimulée
Le nationalisme québécois doit son existence au nationalisme canadien-français et lui en est entièrement redevable. Cette filiation, René Lévesque ne cherchait pas à la dissimuler dans le premier chapitre d’Option Québec, intitulé « NOUS AUTRES » écrit en majuscules. Publié en janvier 1968, Option Québec est le best-seller qui conduira à la fondation du Parti québécois.
Mais qui est ce « NOUS AUTRES » ?
Les quatre mots qui suivent sont : « Nous sommes des Québécois ». Mais dans tout le reste du chapitre, c’est le portrait des Canadiens-Français que dresse René Lévesque, il ne parle que d’eux et les appelle à l’émancipation politique. Comme pour Daniel Johnson, père, l’émancipation politique prend pour lui la forme d’un fédéralisme des nations, qu’il désigne comme la souveraineté-association.
À dix contre un
Le projet de Lévesque était de faire coïncider le sol de la nation avec l’État et son territoire, dans le cadre d’un nouveau partenariat fédéral. La démarche de Daniel Johnson allait dans le même sens. Or cette entreprise, à la fois ambitieuse et modérée, échoua. Devant la férocité de l’adversaire, dont le comportement passé fait toujours craindre un coup fourré ou un recours à la violence étatique, le camp souverainiste n’est pas de taille. C’est là une réalité rarement admise, mais elle explique en partie la valse hésitation entre affirmation et soumission d’un René Lévesque et de tant d’autres. Selon des sources journalistiques, Jean-Jacques Bertrand aurait été intimidé à huis clos dans une conférence fédérale-provinciale. À dix contre un c'est facile. Il s’agit d’un cas… mais n'a-t-on pas écrit des livres entiers sur le sujet de l'intimidation politique !
La fixation du paysage politique 
René Lévesque encourageait l’affirmation nationale pour mettre sitôt le couvercle sur la marmite, dès que montait l’indignation populaire. C’est à juste titre, que très attaché à la paix sociale, Lévesque refusait de passer à une forme ou à une autre de résistance pacifique, même s'il avait publiquement dit vouloir le faire à quelques occasions. Lévesque reste l’homme politique qui a marqué plus durablement que tout autre le paysage national. On lui doit le référendum.
La grande bascule
Des ambitions statutaires, faiblement poussées par une approche référendaire hésitante, témoignent de la disparité des moyens des forces en présence. Et nous en sommes toujours là, devant un choix qui a été fait, un choix qu’a fait René Lévesque et avec lequel il nous faut vivre. Au lieu de consolider l’élément porteur de la cause, l’élément canadien-français, Lévesque a « oublié » le chapitre un de son credo de 1968. Il a changé de doctrine dans l'espoir d'attirer un vote favorable des Canadiens anglais. Ces derniers restent sourds à l’appel, mais la volte-face atténua grandement la place des Canadiens-Français. Le pays devenait non seulement une cause par elle-même, mais elle devait être la cause de tous, quitte à faire payer le prix de l'utopie aux premiers intéressés. On ne peut voir ici aucune exagération. La loi 99 (2000) accorde son dû à toutes les composantes de la diversité québécoise, mais ignore superbement les Canadiens-Français.
La cause des échecs constitutionnels 
C’est l’intransigeance, l’esprit de domination de l’élément anglo-saxon collectif, son refus un peu paranoïaque de partager le pays avec les Canadiens-Français, de les reconnaître comme un peuple fondateur et d’accepter de former avec eux un partenariat dans l’égalité qui est responsable de tous les échecs constitutionnels. 
Un réflexe compensatoire
L’identité québécoise avec ses référendums et son ouverture déséquilibrée aux autres, manifeste dans la loi 99 (2000), n’étaient encore que les façons d’un peuple en position de faiblesse de contourner l’intransigeance avec des moyens décroissants. Toutes ces tentatives de contournement forment les artifices d’un symbolisme compensatoire qui continue d’éblouir bien des partisans.Très humains, trop humains, ils occultent une réalité dérangeante pour s’accrocher à l’idée qu’on est déjà arrivé quelque part. Et si le réflexe compensatoire était seulement pour garder espoir ?

Ce texte est un complément à l'édito Notre fête nationale publié le 18 juin sur : site de la FCF : https://canadiens-francais.com/_ _ _ _ _ _ _







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