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vendredi 14 septembre 2018

Débat des chefs : un enfermement du discours politique

Tout est prévu pour que se maintienne un certain équilibre. Dans le cadre radio-canadien, les questions litigieuses sont expliquées ultérieurement par le régime. Pas question de laisser aux candidats le dernier mot. La parole des aspirants premier ministre sera
décodée ultérieurement. Les journalistes s'affairent, confirment ou invalident les chiffres énoncés en cours de débat, une oeuvre de confinement méta politique. À vif, les quatre principaux candidats n'avaient pas droit à leurs notes et à leurs recherchistes; ce qui n'était pas le cas des journalistes qui ne s'en privent pas. Qui a gagné ? Les journalistes ou les politiques ? Ce pourrait être d'ailleurs une autre façon de poser la question.

Il est vrai que les enjeux du quotidien ne peuvent être écartés. Et la politique-spectacle est là pour nous rappeler que les questions du quotidien sont les seules qui semblent s'imposer. La politique-spectacle commence là et s'arrête là : former un conseil d'administration des affaires courantes de la « gouvernance » sans en contester le cadre, celui des compétences et attributions.

Les analyses de Daniel Lessard ne sont pas idiotes, pertinentes même, mais elles servent au recadrage mainstream. Et Tasha ? Je serai gentil en jugeant que ses employeurs n'avaient pas une haute estime du français !!! Elle a été embauchée pour autre chose...

Couillard défend son bilan en usant de demi-vérités abondamment. Legault se faufile. Des promesses sensées et d'autres insensées.

Manon Massé qui a un peu dérogé, prêche sans patriotisme pour l'environnement. Un argument fort pour l'indépendance, selon elle.  En immigration, son « ils nous ont choisis » sans limite quantitative, montre que QS reprend avec plus d'entrain que les autres la ligne de George Soros et de la grande bourgeoisie mondialisée sur l'immigration. La gauche a trahi son héritage. 

Manon Massé n'a pas parlé de la constituante chère à QS. C'est une grave erreur de perspective que de confiner la constituante dans la bourgade. C'est même la rendre inopérante. La constituante, où les états généraux à tenir au sein de chaque nation, devraient servir à préparer des négociations constitutionnelles avec les défenseurs du statu quo  canadian. Le Québec reconnait déjà sa pluri-nationalité avec la Loi 99. Il reconnaît déjà quinze nations, dont treize nations ethniques !  C'est le Canada anglo-saxon qui est dans le plus profond déni psychologique - pour ne pas dire pathologique - de sa réalité pluri-nationale. Il reconnaît ses immigrants, qu'il défend bec et ongles,  mais pas ses autochtones. Les « autochtones » strictu sensu sont les nations vaincues par la guerre de Sept ans. Pour le régime Trudeau, ces fondateurs du Canada n'existeraient aujourd'hui que comme débris identitaires d'un Canada aux prétentions post-nationales. En fait, le faux nez de la domination anglo saxonne über alles. 

Lisée allume des clignotants pour l'indépendance. S'il est élu - il ne le sera pas - le signal du départ sera donné dans quatre ans. Sinon dans huit ans, en 2026. Le ciel peut attendre. Ceux qui voteront PQ voteront pour bien des choses qui n'ont rien à voir avec l'indépendance... bien souvent pour la simple épuration des moeurs. Le redressement de la moralité publique rend certes nécessaire de virer les libéraux, mais n'a aucun rapport avec les enjeux nationaux qui divisent le Canada depuis 1760. 

Le Québec refuse de s'affirmer mais aime tergiverser sur sa condition, tourner autour du pot. D'abord, qu'est-ce que le Québec ?Le Québec est-il une province, la réponse est oui. Le Québec est-il une nation ? La réponse est non. 

De l'avis général, cette élection marquera la fin du PQ comme parti d'alternance. Son recadrage sur les seuls enjeux du quotidien ne lui permettra pas d'échapper à une trajectoire en déclin depuis 1995.    
En marge des élections, voici pour rappel, un examen des moments forts de ce parti à l'époque où il s'occupait de la question nationale.
Avec cette analyse qui s'écarte de la complaisance des commentateurs officiels, on comprendra mieux pourquoi le PQ a délaissé la question nationale.

Sur le déclin du péquisme

La fine équipe portée au panthéon de nos héros

Je ne veux pas briser mais transformer radicalement notre union avec le Canada
René Lévesque, oct. 1978

Pour moi, ce n'est pas si grave que Lévesque ait dit cela. Les positions néo-fédéralistes se retrouvent partout chez lui. Le problème c'est qu'il n'a pas tenu parole. Il porte avec Claude Morin la lourde responsabilité d'avoir tu ses engagements constitutionnels en 1981. Qui chez ses partisans n'aurait pas été satisfait qu'il plaide à Ottawa la transformation de notre union ? Qu'il dénonce la subordination pour défendre une relation d'égalité ?

Les négociations constitutionnelles se sont terminées abruptement avec la fameuse Nuit des longs couteaux ( ici et ici ) du 4 novembre 1981. C'est sur cet événement que toute l'attention médiatique et politique s'est durablement tournée. Or, comme un train peut en cacher un autre, ce n'était pourtant pas ce qui était le plus grave.

Ces longs couteaux rutilants ont permis de détourner l'attention sur le  fait peu banal que la délégation du Québec était pilotée par un agent des services de renseignements. À moins de croire que la GRC rémunère ceux qui veulent « transformer radicalement» le Canada, on peut trouver là une explication plausible au fait que le dossier de notre reconnaissance nationale n'a pas été déposé, évoqué, plaidé, revendiqué à Ottawa. 


En fait, la stratégie constitutionnelle du Québec était déjà en branle au moment où Lévesque niait l'existence de négociations avec Ottawa. Claude Morin faisait la navette entre les capitales provinciales pendant que Lévesque esquivait les questions insistantes de Claude Ryan, chef libéral de l'époque, sur les intentions constitutionnelles du PQ. Cette situation d'importance a été dissimulée pendant la campagne électorale de 1981 qui, pour le malheur du Québec, reporta le Parti québécois au pouvoir. Croyant voter PQ pour le bien de leur nation, les électeurs élirent ceux qui orchestrèrent leur trahison.





Claude Morin, le père de l'étapisme
et la tête pensante du cafouillage constitutionnel.
Un échec programmé !?






C'est donc à l'insu des électeurs que Claude Morin, premier lieutenant de Lévesque, organisait un front commun des provinces contre le fédéral. Forcément, ce front commun était prisonnier des formules acceptables à toutes les provinces. Cette provincialisation des enjeux écartait d'emblée la question nationale que le Québec posait depuis longtemps. Soudainement, dans le cénacle où la question devait être maintenant soulevée, il n'était plus du tout question de « transformer radicalement notre relation avec le Canada ».

« Claude Morin qui de son propre aveu recevait de l'argent de la
Gendarmerie royale du Canada...»
Pierre Dubuc, L'Autre Journal 
Il faut savoir que le tandem Lévesque-Morin s'était présenté à Ottawa en position d'extrême faiblesse. Qu'on aime l'entendre ou pas, les deux hommes agissaient en violation frontale de la volonté populaire. En effet, quelques mois plus tôt, le premier référendum de mai 1980 avait clairement refusé à Lévesque le mandat de négocier de nouveaux accords constitutionnels. 

Dissimulation aux électeurs, couverture d'un agent fédéral et complicité avec lui, mépris de la démocratie, ils firent quand même à leur tête : se lançant dans des négociations historiques sans mandat, sans ambition et sans préparation ! Une aubaine pour le fédéral. Martin Bisaillon ne sera pas tendre avec Lévesque pour avoir sciemment gardé en place un homme qu'il savait recevoir de l'argent de la GRC. Il écrira : « Voilà certainement le geste politique le plus lâche et le plus égoïste de toute l'histoire contemporaine du Québec. »  Il s'agit en fait de l'épisode le plus humiliant de notre histoire et la défaite la plus cuisante - auto-infligée - qu'a fait subir au Québec un parti politique, toutes étiquettes confondues, depuis la Confédération.

Jacques Parizeau ramassa à la petite cuillère les débris laissés par Lévesque. Reprenant toutefois la même stratégie foireuse, celle du référendum élaborée et défendue par nul autre que Claude Morin. Coup de théâtre, le héros de remplacement démissionna dès l'annonce des résultats serrés du deuxième référendum comme une diva catastrophée. À sa décharge, car je n'ai rien de personnel contre Parizeau, il faut rappeler, toutefois, que son cabinet, formé des illustres membres du grand parti souverainiste, l'avait abandonné. L'homme était seul. Il n'avait plus à ses cotés qu'une poignée de ministres qui lui étaient restés fidèles. 

Curieux qu'il se soit engagé dans la mère de toutes les batailles, qui ne fut au final qu'une escarmouche, avec un entourage aussi peu engagé et déterminé ! C'est donc faute de combattants au sein de l'état-major que les résultats fragiles, hautement contestables du référendum de 1995, en restèrent là ! Monsieur Parizeau regrettera plus tard de se trouver devant « un champ de ruines »; il refusera toutefois d'y voir sa propre main. 

Était-ce le peuple qui avait lâché ?

Et ça continue. On peut notamment s'étonner que le PQ n'ait jamais réclamé l'annulation des négociations constitutionnelles de 1981. N'étaient-elles pas viciées dès le départ du fait qu'une délégation provinciale était pilotée par un agent des services fédéraux ? Ne croyez vous pas que cela pourrait se défendre en droit international ?  Quels pays adoptent des modifications constitutionnelles importantes avec des agents qui orientent les pourparlers afin de ne pas soulever la question délicate des nationalités ? 

Ne croyez-vous pas que Parizeau aurait mieux fait de demander l'annulation des décisions constitutionnelles ? De faire campagne sur cette question plutôt que de jouer quitte ou double, téméraire, sur un autre pari référendaire ? Comme s'il n'y avait aucune cause prégnante à plaider contre Ottawa ? Surtout, pourquoi a-t-il choisi de persister dans la voie funeste tracée par Claude Morin et ses conseillers anglos du camp fédéral ?

Et ça continue (bis). Jean-François Lisée, candidat péquiste aux présentes élections vient de renoncer à promouvoir le projet politique de son parti. Est-ce bien nouveau de sa part ?  En écrivant un discours de capitulation, livré par Lucien Bouchard au Centaur, Lisée et Bouchard n'étaient-ils pas aux premiers rangs de ceux qui avaient déjà renoncé, dès 1995, à défendre les intérêts de la nation de ceux que l'Acte de capitulation de Montréal (1760 ) appelle nommément les Canadiens ?  Ne reste à Lisée que le charme du joueur de flute de Hamelin. Lisée a compris qu'il ne peut pas parler de souveraineté. Le bilan de son parti, qu'il continue d'assumer, le lui interdit. Si les Québécois ont le moindre jugement, et je pense qu'ils en ont, jamais ils ne redonneront leur confiance au Parti québécois. L'épisode des grands espoirs péquistes est terminé.

Alors qui a lâché ? 

Je ne reviendrai pas sur un compte rendu plus détaillé des analystes, commentateurs et politiques à s'en prendre au peuple pour les déboires du PQ. Je pense que le PQ a fait lui-même tout ce qu'il faut pour égrener le support populaire dont il jouissait. 

Le peuple ne s'est jamais « dit non à lui-même », comme on l'entend souvent. Un peuple ne se dit pas non. Il se prononce. Mais l'argument est sans cesse ressassé, comme pour masquer que les grandes figures du panthéon de nos échecs ont manqué à leur devoir. Ils l'ont fait dans des moments de grande importance, comme ces négociations constitutionnelles bâclées qui ont façonné pour le pire notre destin. La défaite référendaire de 1980 n'avait pas pour conséquence automatique de nous enfoncer davantage avec le fiasco constitutionnel de 1981-1982. Il fallait une volonté de persister dans la politique de l'échec pour le faire. 

Faire l'analyse des années péquistes en privilégiant son impact sur la question nationale est un exercice fort déprimant. Or, on ne saurait plus longtemps en faire l'économie. Il se trouve au bout de l'exercice des effets libérateurs, au moins psychologiques... qui libèrent une pensée politique... même si la classe politico-médiatique, complice d'un cafouillage de cinquante ans habilement camouflé, refuse de nous y accompagner. Je ne donnerai pas de nom. 

De toute façon nous sommes ailleurs. Nous migrons vers un autre paradigme. L'ADN du Canada, représenté par sa constitution, le prédestine à la contestation des nations qu'il a refusé de reconnaître. Il suffit de s'unir. C'est aux Amérindiens, Canadiens (1), Acadiens et à tous les autochtones de revendiquer leurs droits constitutionnels et légitimes de nations déchues par la conquête. 
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1- Canadiens avec trois «a» n'existait pas avant 1867.  Le mot « Canadian », trois a, est une appropriation coloniale d'une réalité socio-historique « autre », conquise par les armes, sans motif humanitaire ou de justice. 

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Sur la relance de la question nationale 

Adhérez-vous à ce programme pour débloquer la question nationale désormais laissée vacante ?


La question des nationalités au Canada


Projet : Reformer l'alliance des nations non reconnues du Canada


But : L'égalité statutaire des nations fondatrices pré-britanniques


Forme : La contestation de la constitution du Canada par tous les moyens légaux sur le plan national et international.


Moyens : Organiser des états généraux ( ou autres formes de consultations ) à l'intérieur de chaque nation pour préparer des négociations constitutionnelles


Échéances : États généraux, de 5 à 10 ans; Négociations, de 10 à 15 ans; Aboutissement, de 15 à 20 ans


Comparaison : Le péquisme a mis 50 ans à épuiser tous les espoirs nationaux. Voici ce qui pourrait recréer l'espoir en cinq ans.


Si vous croyez que la question nationale - ou la question des nationalités au Canada - ne peut être laissée vacante prononcez-vous !

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